Orientations royales : Banques, paysans et actionnaires…

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La partie consacrée aux banques, dans le Discours royal, prononcé devant le Parlement, le vendredi 11 octobre, à l’ouverture de la session d’automne, a soulevé toutes sortes de commentaires, dans la presse, comme dans l’opinion publique.

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Se penchant sur la problématique du financement, le Souverain a appelé le secteur bancaire à faciliter l’accès au crédit, aux auto-entrepreneurs, aux jeunes diplômés chômeurs qui voudraient investir (notamment, en Afrique, les banques marocaines étant bien installées dans le continent), au secteur informel…

Un tel accompagnement bancaire aurait indéniablement 5 avantages, au moins. Celui de créer de l’emploi (sans toujours compter sur l’Etat) et donc réduire le taux de chômage ; celui d’aider les jeunes à mettre le pied à l’étrier dans la vie active ; celui d’encourager la création d’entreprise, notamment la TPE et PME qui constitue 95% du tissu économique ; celui de pousser une partie du secteur informel vers le secteur formel ; et celui de booster le taux de bancarisation… 

Autant d’avantages qui ne seraient pas négligeables dans la relance de l’économie et de la croissance. 

Le Roi ne s’y est donc pas trompé. 

Cependant, les commentaires n’ont pas pris cette direction. Et c’est un véritable tir groupé sur les banques qui a suivi l’appel royal au secteur financier.

«Les banques font trop de bénéfices, mais ne renvoient pas l’ascenseur» ; «elles ne prêtent qu’aux riches» ; «les conditions sont draconiennes pour l’octroi d’un crédit»… etc. 

Bien sûr, les critiques adressées aux banques ne sont pas toutes infondées. La sévérité qu’elles mettent à accepter une demande de crédit brise bien des rêves.

Avec un peu de souplesse, elles pourraient encourager tant de modestes projets dont les catégories citées par le Souverain sont porteuses (auto-entrepreneurs, jeunes investisseurs, secteur informel…) ! Et c’est bien entendu à cette souplesse que travailleront Wali Bank Al-Maghrib (Banque centrale du Maroc) et le GPBM (groupement professionnel des banques du Maroc), dans le cadre du plan que le Roi les a engagés à préparer sous sa supervision… Peut-être, une baisse du taux de crédit, la réduction ou l’annulation de l’apport personnel (la CCG garantit 70% du crédit, restent les 30%), une aide spéciale pour le foncier, etc.

Une chose est sûre –et le Souverain le dit- la souplesse dans l’octroi du crédit bancaire, ne décharge pas le demandeur de crédit de ses engagements de remboursement. Il n’est un secret pour personne que les banques ne sont pas des organismes philanthropiques dont l’activité serait le mécénat. Leur argument massue est que l’argent qu’elles prêtent appartient aux clients. C’est l’argent que le client A dépose à la banque, qui est prêté au demandeur de crédit B. Si le demandeur B ne rembourse pas, c’est l’argent du client A qui est en danger. Et si plusieurs demandeurs de crédit à la fois ne remboursent pas, c’est toute la banque qui est en danger. 

Ce sont donc les dépôts des uns qui se transforment en crédits pour les autres. 

Or, les plus avertis savent que les banques connaissent actuellement une baisse de dépôts inquiétante. La crise économique, le manque de confiance, la menace de saisie par le fisc, etc… font que les citoyens gardent leur argent chez eux. Il y a aujourd’hui quelque 250 milliards de dirhams qui circulent en cash, hors des banques. Soit 23% du PIB, selon Bank Al-Maghrib. C’est autant d’argent qui ne profite pas aux demandeurs de crédit. 

En fait, donc, l’appel du Roi, ne concerne pas que les banques, qui doivent assouplir leurs conditions. 

Il devrait interpeller également tous les citoyens qui gardent leur argent chez eux. Car ce sont leurs dépôts qui permettent les crédits. Mais il faut conquérir et gagner la confiance de ces citoyens, dont le paysan, le poissonnier, ou le marchand ambulant, qui ont toujours préféré le bas de laine (ou dessous de matelas) aux banques.

Et cet appel concerne enfin les actionnaires des banques. Car si les banques font de gros bénéfices, en profitant des marges et commissions, c’est d’abord pour leurs actionnaires. Ces derniers vont devoir renoncer à tout ou partie de leurs dividendes, afin d’encourager ces crédits à la TPE et PME qui leur rapporteront plus tard… 

L’objectif du nouveau modèle de développement, cela a été dit et redit, c’est de relancer la croissance et de réduire les écarts et disparités. Et cela ne se fera pas sans quelques sacrifices… Notamment de la part de ceux qui ont le plus… Dans tous les secteurs. 

Tout le génie royal est d’y amener progressivement !

Bahia Amrani

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