Mandarines aux ordures : Les dessous de l’affaire…

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Ces derniers jours, des vidéos ont circulé sur les réseaux sociaux, montrant des camionnettes jetant des tas de mandarines dans les champs pour protester contre la baisse du prix d’achat de ce fruit  par les consommateurs. Et les prix des mandarines sur le marché ont joué au yo-yo, oscillant entre 2,5 DH et 10 DH… Qu’en est-il de cette affaire ?

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A l’appel de certains exploitants agricoles, notamment à Taroudant et à Berkane, les agriculteurs ont déversé des camionnettes de clémentines en pleine campagne. «On est déçu. La production est là. Elle est même très abondante. Mais les prix ont beaucoup chuté dans les fermes», a déclaré un agriculteur dans une vidéo réalisée dans la coopérative «Zaouiya» dans la région de Berkane. «Nous vivons une crise très critique. Le coût de production devient de plus en plus élevé. Il y a beaucoup d’intermédiaires. Si ça ne se redresse pas, on va vraiment vers la faillite. Des actions doivent être envisagées et l’Etat doit intervenir d’urgence pour sauver le secteur», renchérit un autre agriculteur, non sans amertume. Selon ce dernier, les prix sont au plus bas. Tant et si bien que les agriculteurs préfèrent donner leur production aux moutons, comme en atteste, d’ailleurs, l’une des vidéos diffusées cette semaine sur le net.

Lobbying à la manoeuvre…

Qu’est ce qui a fait qu’on en soit arrivé à cette situation ? Quelles sont les raisons qui ont poussé les agriculteurs marocains à jeter de grandes quantités de mandarines et de clémentines toutes fraiches ? Pourquoi ce gaspillage de quantités énormes, qui devaient être plutôt sur les étals de nos marchés.

Les raisons sont nombreuses, soutient un professionnel. Cette année, dit-il, il y a eu un retard au niveau du démarrage de la campagne d’exportation. «Nous avons perdu plusieurs semaines commerciales au niveau du lancement de la campagne », précise Khaled Bounajma, président de l’ASCAM. Celui-ci, qui nous a expliqué les dessous de cette affaire en en donnant toutes les causes dans l’entretien qui suit, accuse –entre autres- des intermédiaires et surtout un lobbying existant au niveau des marchés de gros, de faire baisser le prix du fruit, intentionnellement. L’accusation est lourde. Mais des professionnels, interpellés sur le sujet, déplorent, eux-aussi, le comportement de ce lobbying qui bloque, selon eux, la commercialisation sur le marché national.

Grève et récolte précoce

Autre raison avancée par les agriculteurs: La grève des transporteurs. «Le débrayage des transporteurs routiers ont complètement perturbé le secteur. Nous avons raté plusieurs jours. Car les transporteurs nous ont bloqués pendant plus de deux semaines. Nos frigos sont restés pleins car on ne pouvait pas livrer notre production», assure un professionnel dans la région d’Agadir. Autre élément d’explication de la baisse des prix: la récolte est arrivée en avance cette année, du fait des conditions climatiques hivernales très clémentes. C’est ce qui a d’ailleurs fait que le volume a dépassé les prévisions et que d’importants stocks se sont constitués d’un coup, selon ce même professionnel. Cela a provoqué une surproduction de la clémentine, dans un contexte où plusieurs pays ont baissé leurs importations des agrumes.

Dans certaines régions, comme Taroudant ou encore Berkane, le prix de la mandarine dans les marchés de gros a baissé de manière vertigineuse. Il est de 30-40 centimes le kilo. Au détail, ce fruit est vendu aux consommateurs à un prix allant de 2 à 3 DH le kilogramme. Alors que dans les grandes surfaces, le prix de la mandarine a pu atteindre 10 dirhams. «La qualité de ce fruit laisse pourtant à désirer. Car il est en fait destiné à l’écrasement», confie un professionnel.

Terrains vagues et triporteurs rageurs

Suite à cette situation et parce que les agriculteurs n’arrivent plus à rentrer dans leurs frais, certains d’entre eux ont donc préféré jeter leur production. Pour l’heure, on ignore encore le pourcentage de la production de la mandarine qui est concernée. Mais des voix professionnelles dans la région de Souss Massa confient que les quantités jetées aux ordures seraient importantes. «On aurait pu distribuer ces mandarines, sous forme de dons, aux associations», regrette un casablancais.

Face à la surproduction, les professionnels reconnaissent que la situation est alarmante. La première problématique à régler par les producteurs des agrumes est la capacité de conditionnement qui reste inférieure aux volumes de mandarines produits en cette période, selon le président de l’ASCAM, Khaled Bounajma.

Pour celui-ci, l’autre contrainte pour les opérateurs réside dans le fait que les marchés d’exportations ne peuvent plus absorber tout le produit en cette période allant de novembre à janvier. La solution, dit-il, réside dans la mise en place de certains dispositifs pour stabiliser les prix et limiter l’intervention des intermédiaires.

Il s’agit, entre autres, de créer de nouvelles unités de conditionnement de jus, afin de valoriser le produit en cas de baisse des prix de vente en frais et d’adapter la production aux normes internationales de qualité, est-il souligné à l’ASCAM.

Une chose est sûre, la succulente mandarine, qui fait rêver sous d’autres cieux, fait aujourd’hui peine à voir, jetée dans les terrains vagues et écrasée par des triporteurs rageurs…

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