Médias : Cette «Zizanie» autour de la subvention de la presse…

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Ce n’est pas un secret, la presse marocaine reçoit une subvention de l’Etat. Ce n’est pas une exclusivité non plus, plusieurs pays en font de même. Comme la France, pour ne citer qu’une des démocraties les plus proches…

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Le 15 novembre 2002, à l’occasion de la «Journée nationale de la presse», le Roi avait estimé que la presse avait droit à un soutien financier. Ce dont bénéficiaient les partis politiques jusque-là. 

L’idée qui avait présidé à cette décision, est à nouveau valable aujourd’hui, à l’ère des grandes transformations technologiques. 

Il s’agissait, non pas «d’acheter la presse», comme l’ont pernicieusement répandu les détracteurs patentés de toute nouvelle initiative au Maroc, mais tout simplement d’aider la presse à mettre à niveau ses moyens de production… Et sa production tout court ! 

Il avait fallu établir des règles de répartition de cette subvention, afin que les différents titres de presse en bénéficient de façon équitable, chacun selon sa catégorie.

Un Contrat-Programme avait alors été signé par le (défunt) ministère de la Communication et la Fédération Marocaine des Editeurs de Journaux. Les critères et conditions d’obtention de la subvention y avaient été détaillés et tout journal qui répondait aux critères et conditions, membre ou non de la Fédération, y avait droit. 

C’est le système –avec ses forces et ses faiblesses- qui a prévalu jusqu’à cette année 2019. 

En principe, 2016 devait y mettre fin… Mettre fin, non pas à la subvention, mais au système qui la régit.

En effet, avec le nouveau Code de la presse, promulgué en juillet 2016, la subvention n’est plus attribuée sur la base d’un Contrat-Programme, mais sur celle de la loi. Elle est attribuée sur la base de l’article 7 de la Loi 88-13 relative à la presse et à l’édition, une des 3 lois que contient le Code de la presse.

Mais le décret qui devait consacrer cette loi -et fixer les grandes lignes des conditions d’attribution de la subvention- a mis deux ans à voir le jour. Devait ensuite suivre un arrêté ministériel commun à deux ministères: le ministère de la Communication et celui des Finances, afin d’arrêter les conditions et critères dans les détails. La Fédération Marocaine des Editeurs de journaux et le ministère de la Communication y ont travaillé pendant de longs mois… Sauf que le remaniement ministériel d’octobre dernier est intervenu, supprimant le ministère de la Communication. L’adoption de l’arrêté ministériel commun a donc été remise à plus tard… Tous les efforts qui ont été déployés, depuis, ont consisté à éviter que la presse, déjà en crise, ne connaisse une année blanche… 

Une option a été retenue, celle de continuer d’appliquer le Contrat-Programme, puisque l’arrêté ministériel n’a pas encore été adopté.

La prouesse de tout organiser, ensuite, afin que les mandatements de la subvention soient effectués avant la date butoir des budgets ministériels (le 15 décembre) a été, difficilement, mais finalement, réussie…

La subvention ne sera encaissée que l’année prochaine, mais il y a l’assurance qu’elle le sera. 

Or, à peine ce marathon terminé, une certaine liste des subventions accordées à la presse a été postée sur la toile, déclenchant une avalanche de commentaires et appréciations erronées, voire des insultes, qui appellent ici, au moins sommairement, des corrections (viendra le temps d’un dossier sur la presse dans tous ses états…).

Il a, par exemple, été maintes fois répété que la subvention est un scandale (fadiha), parce que donnée à des journaux que personne ne lit, alors que ceux qui sont actifs sur les réseaux sociaux et que toute la population suit, ne reçoivent rien… Qu’elle est une rente (erri’â) accordée à des journaux qui «se partagent le gâteau» (el keâka) et gaspillent l’argent public (tabdir el mal el âm)… Que certains médias ont fait main basse sur la subvention et que de grosses sommes leur sont attribuées, alors qu’à d’autres, il est demandé de servir le pays, sans rien… 

Comment répondre à tout cela brièvement, sereinement et sans offenses inutiles ? Comment juste expliquer que les réseaux sociaux sont sans doute utiles comme lanceurs d’alertes, qu’ils ont effectivement une large audience parce qu’interactifs et à la portée de tous ; mais qu’on n’y trouve pas que du vrai… Que la presse est un métier qui consiste à répondre au droit du citoyen à une information juste, vérifiée, complète… En un mot, professionnelle… Et que cela nécessite des moyens… Comment dire que la réaction de ceux qui voient s’aligner de grosses sommes, sans savoir à quoi elles sont employées, peut se comprendre, mais que ces sommes (quand elles sont exactes. Souvent, ce qui circule sur la toile est exagéré) sont attribuées proportionnellement aux dépenses (un quotidien qui reçoit 4 millions de DH en dépense plus de 40 et emploie plus de 100 personnes)… Qu’elles ne couvrent qu’une partie plafonnée de ces dépenses (la subvention ne devant pas dépasser 40 à 50% du coût global de production de l’entreprise de presse)… Que cette subvention permet de couvrir une partie des salaires des journalistes seulement et peut être considérée comme une contribution de l’Etat à la politique de l’emploi… Comment enfin dire que la subvention n’est pas donnée en échange d’une quelconque contrepartie ? Si ce n’est, pour la presse, de remplir son devoir d’information du citoyen… Et que le patriotisme ne s’achète pas, pas plus qu’il ne conditionne quoi que ce soit… Annahj Addimocrati soutient le Polisario et, pourtant, son média recevait la subvention, dans le cadre de la pluralité démocratique…

Il est vrai qu’il y a bien des points à revoir dans le système actuel de subvention, bien des corrections à y apporter, pour plus d’équité. Mais cela nécessite un vrai travail. Ce n’est pas sur les réseaux sociaux que cela pourra être réglé.

Bahia Amrani

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