Les propriétaires des bateaux de pêche en haute mer ne sont pas contents. Pour cause, la dernière décision du ministère de la Pêche maritime de soumettre leurs prises à une taxe de 4%.
Des sources bien informées soulignent au Reporter que cette décision de taxe a récemment été prise par les responsables du ministère, précisant que le sujet a été au centre des débats d’une rencontre présidée par Zakia Driouch, SG du département de la Pêche maritime, le 3 décembre à Rabat. Les mêmes sources soutiennent que la décision devrait entrer en vigueur à compter de janvier 2019. «A l’exception du poulpe, tous les produits de mer, qui seront désormais pêchés par les armateurs de la pêche hauturière, seront soumis à une taxation», précisent nos sources. En chiffres, indiquent-elles, ce n’est pas moins de 120 mille tonnes de produits de mer pêchés par les hauturiers qui échappent à la trésorerie de l’Etat. Soit un manque à gagner de 12 milliards de centimes.
Cette décision ne peut que réjouir les professionnels de la pêche côtière. Ces derniers, qui ont fait du lobbying dans ce sens, sont d’ailleurs sortis de cette réunion globalement satisfaits. Commentaire de Larbi Mhidi, président de la Confédération nationale de la pêche côtière: «On ne peut qu’apprécier une telle décision. Nous avons demandé à ce que la loi soit appliquée dès janvier 2019». «Les armateurs de la pêche hauturière doivent également être soumis à la taxation, comme le sont d’ailleurs les opérateurs de la pêche côtière, lesquels paient aujourd’hui une taxe de 4% sur les produits de mer vendus, aussi bien sur le marché local que sur le marché international», souligne le président de la Confédération, qui a assisté à la réunion.
De Dakhla à Saïdia, le spectre de cette décision ministérielle fait, en tout cas, trembler certains pêcheurs hauturiers marocains. Si cette décision entre en application, «on peut vendre le bateau et mettre la clé sous le paillasson», s’écrie le responsable d’un chalutier opérant dans la pêche hauturière. Et celui-ci de poursuivre: «On veut notre perte. Cette décision risque de porter un coup dur à note secteur».
Et comme un malheur ne vient jamais seul, les hauturiers, qui ont visiblement fait les frais de la rencontre du 3 décembre, ne seront plus autorisés à utiliser le filet OGV, un engin de pêche qu’ils utilisent depuis maintenant plus d’une année, notamment dans les zones rocheuses. Selon nos sources bien informées, cette décision devra entrer en vigueur à compter du 1er janvier 2019. Le décret d’application de cette décision serait actuellement en cours de préparation. Notons que la pêche avec ce filet prohibé dans les zones rocheuses a, depuis plus d’une année, défrayé la chronique dans les milieux des professionnels de la pêche côtière. Car, dit-on, le recours à ce type d’engins a un impact très négatif sur le stock des ressources halieutiques, mais aussi sur l’environnement.
«Ce filet détruit totalement la ressource, surtout dans les zones rocheuses. Les bateaux hauturiers opérant dans le domaine du céphalopode pêchent d’autres espèces, dont la sole, la dorade, etc. L’objectif de ces gens n’est donc plus seulement le poulpe, puisque près de 90% de leur pêcherie est composée de différentes espèces, alors que le poulpe ne constitue que 10% de leur prise», explique un professionnel du secteur.
Autre fait marquant de la rencontre, l’exposé détaillé de l’Institut National des Ressources Halieutiques (INRH) sur la situation préoccupante de la ressource poulpière. En effet, les résultats des analyses effectuées par l’INRH, sur la période allant de juillet à novembre 2018, confirme que les stocks de poulpe ont beaucoup baissé au Maroc, indiquent des professionnels ayant assisté à la rencontre. «Selon le rapport de l’INRH, les poulpes sont encore très petits. Les rejets des juvéniles ont atteint entre 65 à 67%, notamment dans les zones sud du pays», précisent les mêmes sources.
Les responsables du département de la pêche ont, semble-t-il, reçu le message cinq sur cinq. D’ailleurs, il a été décidé de prolonger la période du repos biologique jusqu’au 5 janvier, au lieu du 15 décembre prévu initialement, selon des sources officieuses au ministère.