La vidéo d’une agression sexuelle dans un bus à Casablanca continue d’alimenter une vague d’indignation dans le pays. Un sit-in de colère, qui a rassemblé plus de 200 personnes, a d’ailleurs été organisé, mercredi 23 août, place des Nations unies, à Casablanca, pour dénoncer le harcèlement sexuel dont sont victimes les Marocaines.
Au cœur de leur indignation: le scandale de l’agression collective dont a été victime une jeune fille de 24 ans, atteinte d’un handicap mental. «Rien ne doit innocenter un violeur», «Que justice soit faite contre les agresseurs», «Stop à la violence contre les femmes», «Une femme n’est pas un objet», «Nos espaces publics ne sont pas la propriété privée des hommes», «Les lois pour les hommes, le viol pour les femmes», «Non à la culture du viol», «Ce n’est pas parce que je suis dans un lieu public que mon corps est public»… Ce sont les slogans de ce sit-in qui a été organisé, deux jours après la diffusion de la vidéo insoutenable, à l’initiative d’un collectif de militantes féministes. L’appel a été lancé sur les réseaux sociaux, pour déplorer la vidéo montrant une jeune femme, en larmes, se faire agresser sexuellement, en plein jour, par un groupe d’adolescents, dans un bus qui, malgré cette horrible agression, poursuit son chemin. Dans une déclaration au «Reporter», beaucoup de manifestantes, non sans colère, tirent la sonnette d’alarme sur la recrudescence des cas de harcèlement supportés par les femmes dans les espaces publics devenus, ces dernières années, les lieux où les agressions physiques contre la femme sont les plus manifestes. «Chaque jour, chaque fois que nous sortons dans la rue, nous avons peur de connaître le même sort que cette malheureuse jeune fille du bus. Nous n’avons plus confiance ni en la justice ni en les autorités. Car, il n’y a plus de sécurité pour les femmes dans les lieux publics. Nous sommes là pour demander aux autorités de mettre fin à cette situation très inquiétante de la condition de la femme marocaine», lance Amina, une manifestante. Nora, une jeune fille belge qui vit à Casablanca, depuis deux ans, se dit choquée. «En soutien à la jeune agressée dans un bus à Casablanca, je participe à ce sit-in pour dire non à la violence contre la femme. En tant que femme vivant à Casablanca, je dois dire que l’on est victime du harcèlement sexuel tous les jours, dans la rue. Ce n’est pas normal», témoigne cette jeune belge.
«Combien de Marocaines vont continuer de supporter le même sort avant que justice soit faite?», se demandent des activistes féministes sur la place des Nations unies. Celles-ci, indignées, regrettent que le projet de loi contre les violences à l’égard de la femme traîne depuis maintenant cinq ans au Parlement. «Le drame de la jeune fille ayant été agressée sexuellement dans un bus a été très médiatisé. La scène a été filmée et tous les Marocains ont été choqués en voyant la vidéo. Mais il faut savoir que sortir de sa maison devient aujourd’hui un danger réel pour chaque femme au Maroc. Chaque jour, des incidents similaires se passent dans les lieux publics. C’est très inquiétant. Il est temps de faire aboutir le projet de loi contre la violence à l’égard des femmes pour que la loi soit appliquée contre les agresseurs», insistent les militantes, qui adressent leur message aux pouvoirs publics.
Pour Salah El Ouadie, président du mouvement Damir, présent au sit-in, «il est temps que les pouvoirs publics assument leurs responsabilités». «La présence de la femme dans les espaces publics au Maroc est en danger. Que de tels actes, comme celui de l’agression collective, en pleine journée, dans un bus à Casablanca, puissent arriver dans notre pays, cela montre que la situation est très grave. Et il faut que tous les intervenants publics prennent les choses au sérieux, notamment sur le plan sécuritaire», a-t-il dit. Avant de conclure, fermement: «On ne peut pas justifier de tels crimes par la pauvreté ou encore par les mauvaises conditions de vie. Toute personne est comptable de ses gestes et la loi doit s’appliquer dans cette affaire d’agression collective».
Lundi 21 août, les autorités sécuritaires ont indiqué avoir arrêté six individus, âgés de 15 à 17 ans, suspectés d’être les auteurs de l’agression. Celles-ci ont affirmé qu’elles n’ont reçu aucune plainte, ni de la part de la jeune femme agressée, ni de la part du chauffeur. La jeune fille, Imane, faisait l’objet d’un avis de recherche «sur la demande de sa famille, après avoir quitté en mai dernier son foyer vers une destination inconnue», a indiqué mercredi soir (23 août) la police, qui dit avoir retrouvé «la victime de cet horrible agression».