Diminution des taxes, plafonnement des carburants, indexation, gasoil professionnel, etc. Alors que les montants des aides octroyées aux transporteurs ont été dévoilés cette semaine, le regard des transporteurs se tourne déjà vers l’Exécutif pour trouver une solution à long terme afin de limiter les répercussions de la flambée du carburant sur leur chiffre d’affaires. Les détails.
Le prix du carburant ne cesse d’augmenter et les mesures du gouvernement qui viennent d’être annoncées tombent à point nommé. Après l’annonce du gouvernement, les professionnels frappés par la flambée brutale du prix du carburant, soulignent qu’ils «se félicitent de cette aide financière». Ils viennent d’obtenir satisfaction sur une part essentielle de leurs revendications: le versement d’une aide directe urgente. Mais la manière dont aurait été faite la conception gouvernementale pour fixer les montants octroyés aux transporteurs déplait à certains transporteurs.
Dans le contexte actuel et dès lors que les estimations qui sont faites indiquent que les augmentations des prix du carburant vont encore continuer, évidemment que cette aide financière ne peut être que bénéfique pour les professionnels du secteur, souligne Najib Ben Haddou, directeur de l’Association marocaine de transport national et international de la logistique. Toutefois, celui-ci évoque certaines critiques. «Il est aberrant de fixer le montant de l’aide sur la base seulement d’une carte grise», lance Najib Benhaddou. Cela signifie, précise-t-il, «que pour un camion, on peut avoir la subvention sans même aller chercher à savoir si ce camion est en activité ou non». Or, normalement, seul un camion qui est opérationnel pendant toute l’année doit bénéficier de cette aide».
Ce professionnel du transport critique aussi, non sans exacerbation: «Un camion qui opère, par exemple, entre le port de Casablanca et la zone d’Ain Sebaâ bénéficie du même montant qu’un camion qui est, lui, actif entre Agadir et Perpignon en France. «Ça n’a aucune logique», concède-t-il. Celui-ci affirme, au passage,«que les transporteurs n’ont pas été consultés pour donner leur avis sur les montants des aides».
Ces aides devront permettre de prendre en charge le surplus des dépenses des entreprises de transport. «Le gasoil constituait 33 % de la structure de nos charges. Mais depuis qu’il a flambé, il y a plus de trois mois, le gasoil a atteint entre 49% et 50% de nos dépenses», a détaillé Najib Ben Haddou.
Des aides allant de 1000 à 7000 Dhs
Comme attendu, les montants de ces aides octroyées aux transporteurs ont été dévoilés cette semaine par l’Exécutif. Celui-ci a lancé officiellement, mercredi 23 mars 2022, le processus de soutien exceptionnel des transporteurs pour pallier les répercussions de la hausse insoutenable des prix des carburants.
Ce plan d’aide, qui été annoncé lors du Conseil de gouvernement du 10 mars, concernera quelque 180.000 véhicules. Les transporteurs pourront bénéficier, à partir de la première semaine du mois d’avril, de ce soutien selon les catégories, via la plateforme https://mouakaba.transport.gov.ma.
Dans les détails, un communiqué du Département du Chef de gouvernement indique que les professionnels du transport public de voyageurs bénéficieront d’une subvention de 2 200 Dhs pour les grands taxis, 1600 Dhs pour les petits taxis, 1 800 Dhs pour les véhicules de transport mixte dans le monde rural, auxquels s’ajoutent 7 000 Dhs pour les autocars inter-villes et 6 200 Dhs pour les autobus.
Les professionnels du transport de la logistique, quant à eux, bénéficieront d’un soutien financier de 2 800 Dhs au profit des autocars de 1ère série, 1 400 Dhs pour les minibus de 2ème série et 1.000 Dhs pour les véhicules de 3ème série (TGR/TLS). En ce qui concerne les professionnels du transport de marchandises pour compte d’autrui, un soutien financier de 1000 Dhs sera alloué aux véhicules de dépannage, 2 600 Dhs pour les camions dont le PTAC est supérieur à 3,5 tonnes et inférieur à 14 tonnes, 3 400 Dhs pour les camions dont le PTAC est compris entre 14 et 19 tonnes, et 4 200 Dhs pour les camions dont le PTAC est supérieur à 19 tonnes, ainsi que 6 000 Dhs au profit des tracteurs routiers.
S’agissant du soutien alloué au transport de personnel et au transport scolaire, les professionnels du transport de personnel pour compte d’autrui bénéficieront d’une aide financière de 1 200 Dhs pour chaque véhicule, et de 1 000 Dhs pour chaque véhicule affecté au transport scolaire pour compte d’autrui.
Des mesures à long terme…
Ces mesures d’urgence suffiraient-elles pour faire face à la flambée des prix? Combien de temps vont-elles durer ? Pour l’heure, les professionnels, approchés par Le Reporter, l’ignorent. Mais ils jugent qu’il faut des solutions efficaces « à long terme », comme nous l’a d’ailleurs souligné Najib Ben Haddou, directeur de l’Association marocaine de transport national et international de la logistique, laquelle est affiliée à l’Union générale des entreprises et des professions (UGEP).
Le regard des transporteurs se tourne vers l’Exécutif pour trouver une solution durable afin de limiter les répercussions des hausses du carburant sur leur chiffre d’affaires. «Nous ignorons combien de temps le gouvernement va continuer d’octroyer ces aides au secteur du transport. Le communiqué du gouvernement ne l’a pas précisé. Mais on sait que ces subventions sont temporaires. On attend donc des solutions durables et des mesures réelles parce que les prix du carburant vont continuer d’augmenter et cette flambée nous inquiète», a réagi Najib Ben Haddou. Le gouvernement n’a pour l’instant pas évoqué une réflexion à ce sujet, mais plusieurs «solutions» sont déjà proposées par les professionnels.
Face à la hausse du prix des carburants à la pompe, qui atteint des records, l’instauration d’un gasoil professionnel se placerait comme solution pour soutenir les transporteurs, comme l’a souligné le directeur de l’Association. «Déjà mis en place pour d’autres secteurs comme la pêche maritime, le gasoil professionnel est la solution la plus appropriée pour le secteur de transport», concède ce professionnel de transport. Mais ce n’est pas la seule solution proposée, relève-t-il. Il prône également l’indexation, qui, dit-il, a l’avantage de permettre de répercuter les hausses des carburants sur les factures des clients des transporteurs. Mais cela nécessitera des mécanismes à mettre en place, en plus d’un dispositif juridique qui organisera la relation entre le transporteur et son client, conclut ce transporteur de marchandises.
Naîma Cherii
|
|||||