A la question de savoir quelle action royale a dominé toutes celles qu’a pu entreprendre le Souverain au titre de l’année en cours -et qui a profondément déterminé la vie politique, économique et sociale du pays- nul besoin de réfléchir longtemps.
La réponse s’impose d’elle-même.
En cette année 2020, annus horribilis, marquée par la cauchemardesque crise sanitaire qu’a provoquée la pandémie du nouveau Coronavirus Covid-19, c’est la gestion royale de cette crise qui fera date.
Une gestion qui a stupéfait l’opinion publique, d’abord nationale, puis internationale.
Si les choix faits par SM Mohammed VI n’étaient pas évidents, c’est qu’ils avaient un coût et non des moindres.
Ils ont cependant été faits… Avec une seule ligne conductrice: la préférence royale.
Ce qui a d’abord stupéfait l’opinion, c’est l’immédiateté des décisions prises par le Roi. Pas d’hésitation. Pas de tergiversations. Dès le 1er cas de Covid-19 identifié sur le sol marocain, les annonces de fermeture des frontières se sont enchaînées. Fermeture des frontières avec l’Espagne, l’Italie, la France… Puis avec tous les autres pays, voisins ou non, jusqu’à la fermeture totale des frontières terrestres, aériennes et maritimes du Maroc.
A ces tout débuts de la pandémie –qui n’en était d’ailleurs qu’au stade d’une épidémie- ces décisions royales ont interloqué.
De même qu’ont interloqué les tout aussi immédiates décisions qui ont suivi. Celles instaurant l’état d’urgence sanitaire et le confinement de l’ensemble de la population.
Du jamais vu !
En fait, devant le danger que pouvait représenter la pandémie, notamment celui d’une propagation à grande échelle du mortel virus, le Roi du Maroc faisait un choix.
Entre préserver les intérêts économiques du pays –aussi bien en interne qu’à l’international- et préserver la vie des citoyens, le Souverain tranchait.
La vie du citoyen a eu la priorité absolue.
Combien d’autres pays allaient être amenés, plus tard, à prendre les mêmes décisions (fermeture des frontières, état d’urgence sanitaire, confinement…). Mais après des louvoiements qui ont coûté cher en vies humaines !
Certains n’ont pas fini d’en payer le prix… Les Etats Unis, par exemple, où la facture -outre les dizaines de milliers de morts- pourrait comporter également un coût politique pour le Président Trump qui a imprudemment mésestimé la dangerosité de la pandémie, n’ayant à cœur que la résilience économique face à la crise sanitaire. Résultat: aucune guerre entreprise par les Etats Unis n’a fauché autant de vies que le nouveau Coronavirus Covid-19… Plus de 146.000 morts à fin juillet 2020 ! Sans compter les 42 millions d’Américains contaminés.
Préférence royale et révélation
Au Maroc, la préférence royale, qui est allée à la préservation de la vie des Marocains plutôt qu’à celle des intérêts économiques du pays, n’aurait pas autant marqué les esprits si elle s’était résumée à ce choix fait en début de crise.
Après tout, il y a plusieurs années que le Roi a placé le volet social parmi les priorités du pays, amenant le gouvernement à orienter, de plus en plus, le budget général de l’Etat dans ce sens.
Si la préférence royale a constitué une véritable révélation, le «secret» en est qu’elle a été déclinée en une stratégie à plusieurs paliers. Palier sanitaire, sécuritaire, financier, social, industriel, économique…
Une stratégie menée sur le terrain, de bout en bout, de main de maître, dans le cadre d’une judicieuse ingénierie.
Chaque jour, un peu plus surpris, les Marocains ont vu se déployer une organisation exceptionnelle qui a restauré leur confiance dans l’Etat.
Ils ont vu une «Task Force» se mettre en place, dans le cadre d’un Comité de Veille Economique (CVE) où les représentants de tous ces paliers ont été réunis pour une gestion synchronisée de la crise, sous la haute supervision royale.
Et pour que leur vie soit préservée…
Ainsi, en application de la préférence royale, préserver la vie des citoyens devenait une responsabilité au niveau sanitaire, en 1er lieu. D’où la mobilisation du ministère de la Santé et la mise à sa disposition de grands moyens, par le biais du Fonds Spécial de lutte contre la pandémie, créé par le Souverain qui y a versé, le premier, 2 milliards de dirhams, via la Holding Al Mada.
Fonds Spécial qui, grâce aux dons, tant des grands Groupes que de simples citoyens, a réuni plus de 33 milliards de dirhams, à fin juin 2020.
Et si, pour se préserver du virus, le citoyen avait besoin de matériel de protection en quantités suffisantes et à la portée de sa modeste bourse, la mobilisation du ministère de l’Industrie et du Commerce, dans la lancée de la stratégie royale, a eu des résultats spectaculaires. Non seulement des unités industrielles, rapidement et intelligemment reconverties en fabriques de masques, ont couvert tous les besoins nationaux, au prix défiant toute concurrence de 80 centimes l’un, mais elles ont permis au Maroc de se hisser, sur la scène internationale, au rang de 1er exportateur de masques sanitaires.
Préserver la vie des citoyens nécessitait également la prise de décisions sécuritaires strictes et rigoureuses, adaptées au fur et à mesure à l’évolution de la pandémie (confinement, état d’urgence, couvre-feu, non-circulation entre les villes, de-confinement, re-confinement partiel…). Ce dont était chargé le ministère de l’Intérieur auquel le cadre juridique de l’état d’urgence permettait d’agir avec agilité et souplesse, sans attendre, chaque fois qu’une décision s’imposait, le blanc-seing formel du gouvernement ou du parlement.
Par ailleurs, le confinement ne permettant pas toujours aux citoyens de gagner leur vie et l’état d’urgence condamnant même beaucoup d’entre eux à un arrêt total de leurs activités, l’un des axes essentiels de cette gestion édifiante de la crise, a été le volet financier.
Un tel désastre et pourtant…
Aux initiatives de Bank Al-Maghrib (baisses inédites du taux directeur à 2% à la mi-mars, puis à 1,5% à la mi-juin ; libération intégrale de la Réserve monétaire obligatoire, dont le taux est passé de 2% à 0% ; soutien aux TPME ; aux banques participatives, aux organismes de micro-crédit ; règles prudentielles temporairement assouplies…), s’est adjointe la mobilisation du ministère des Finances et de son chef de file, Mohammed Benchaâboun (dont aucun de ses prédécesseurs n’a eu pareilles difficultés au cours de leur mandat), ainsi que la mobilisation de toutes les banques de la place, de la Caisse Centrale de Garantie, de la CNSS… Avec un point d’orgue au niveau humanitaire…
En effet, à l’intersection des paliers financier et social, le Maroc s’est très vite démarqué par la mise en place d’un système de soutien financier aux plus vulnérables, dont on a pu, à l’occasion, constater le nombre considérable (ce sont 6 millions de ménages qui ont bénéficié de ces aides financières directes servies dans le cadre de l’opération «Tadamon» et à travers les indemnités versées par la CNSS. Soit 70% du total des ménages marocains, selon les chiffres du ministre des Finances, présentés au parlement le 10 juillet).
Aides allouées d’abord à ceux inscrits au RAMED (Régime d’assistance médicale), puis à ceux du secteur informel: 800 dirhams (DH) mensuels pour un foyer à 2 personnes, 1.000 DH pour une famille de 4 personnes, 1.200 DH pour un ménage de plus de 4 personnes.
Pécule dérisoire, sans doute, mais l’initiative a été considérée comme une belle première et un effort appréciable, au moment où, du fait des conséquences catastrophiques de la pandémie, l’Etat ne pouvait compter ni sur le tourisme qui représente plus de 7% du PIB, ni sur la filière automobile avec ses parts de plus de 6% du PIB… Encore moins sur le secteur agricole qui représente près de 13% du PIB, pour cause de deux années consécutives de sécheresse… Pas plus qu’il ne pouvait compter sur les autres secteurs économiques, tous fortement et négativement impactés par la crise sanitaire. Autant de béants manques à gagner !
Un tel désastre… Et pourtant, vaille que vaille, le Roi a continué d’accorder la primauté, non aux intérêts économiques, mais à la sécurité sanitaire des Marocains, à leur vie.
Ce souci de préserver la vie, prégnant dans l’esprit du Roi, recevra quelques semaines plus tard une nouvelle illustration dans son geste de solidarité en direction de 15 pays africains auxquels, sur ses instructions, ont été expédiées par vols spéciaux des cargaisons de produits de protection contre la pandémie Covid-19: masques, gels, visières, charlottes, blouses, antibiotiques… Le tout made in Morocco et gracieusement offert.
Avec la quinzaine de pays africains –Peuples et dirigeants- le Roi Mohammed VI mettait en partage sa préférence: la vie d’abord, la sécurité sanitaire avant toute autre considération !
Avec le Roi, le mot d’ordre…
Cependant, pour avoir été différées, les préoccupations économiques ne pouvaient être ignorées.
L’immensité des problèmes auxquels il fallait (et il faut encore, aujourd’hui plus que jamais) faire face, n’est pas le lot du seul Maroc, certes. Mais que tous les pays, notamment les principaux partenaires commerciaux, soient logés à la même enseigne, ne pouvait qu’empirer la situation.
Du fait de la pandémie Covid-19 et des mesures draconiennes qu’il a fallu prendre pour s’en protéger, tous les secteurs économiques ont été paralysés.
La fermeture des frontières et le confinement ont eu pour inéluctable conséquence de donner un coup d’arrêt aux activités de secteurs vitaux pour l’économie nationale.
L’Etat allait être inévitablement confronté à toutes les sollicitations, tous les appels de détresse… Et simultanément ! Ceux des particuliers et ceux des entreprises.
De plus, faut-il le souligner à nouveau, Covid-19 a dévoilé l’affligeante étendue de la vulnérabilité de la population (70% des ménages).
Si, dans l’urgence de la gestion royale de la crise sanitaire, des aides financières directes ont été distribuées aux particuliers et des «solutions-oxygène» ont été mises à la disposition des entreprises, il fallait ensuite s’atteler sans tarder à la relance de l’économie nationale et de tous les secteurs qui la portent.
D’où une nouvelle mobilisation pour mettre au point un plan de relance, qui s’est basé sur les renseignements collectés auprès des secteurs économiques (pour chaque secteur, quel impact de la pandémie et quelles conditions de relance ?), mais aussi sur les moyens de l’Etat.
C’est ce qui a donné lieu à la Loi de Finances rectificative, approuvée en Conseil des ministres le 6 juillet 2020) et définitivement adoptée par le parlement le 21 juillet, avant d’être publiée au Bulletin Officiel lundi 27 juillet pour son entrée en vigueur.
Personne ne se fait d’illusions sur la remontée de la pente qui sera des plus difficiles. Mais… Le Roi a les rênes. Le Roi a une vision. Et le Roi a un projet. Celui d’un nouveau modèle de développement pour le Maroc. Lequel, compte tenu des éclairages –positifs et négatifs- apportés par la situation de pandémie, saura tirer les leçons de l’expérience qui vient d’être vécue.
Le recadrage ne fait pas de doute. Mais, pour la mise en œuvre, il appartiendra à tout un chacun d’y mettre du sien.
En pleine pandémie, avec le Roi, le mot d’ordre était: «Le Marocain d’abord !».
Après la pandémie, avec le Roi, le mot d’ordre sera: «Le Maroc d’abord !».
Et l’on peut même commencer tout de suite en consommant national. L’économie marocaine a plus que jamais besoin de cela. La consommation interne est son vrai moteur, en ces temps de repli conjugué à tous les modes.
Bahia Amrani
L’ombre au tableau
Tous les efforts déployés pendant la pandémie du nouveau Coronavirus Covid-19, que les Marocains ont applaudis des deux mains, heureux de découvrir un Etat-Providence à leurs petits soins… Toute cette confiance retrouvée dans cet Etat -si souvent fustigé- et qui devait constituer un nouveau départ dans les relations entre le citoyen et les autorités… Tout ceci va-t-il voler en éclat, n’ayant pas pu tenir plus de 5 mois ?
On était tellement bien dans cet état de grâce si rare chez le Marocain, qui a chopé «le virus du râle permanent» du Gaulois, du temps de la colonisation.
On s’auto-congratulait…
Et puis, patatras… Le Marocain furax reprend ses droits !
Oubliée la belle et exceptionnelle gestion de la pandémie. Oublié le citoyen marocain, centre du monde. Oubliés les masques à gogo et les louanges pleuvant de partout… Oublié tout ça !
Tout effacé en quelques heures.
La faute à qui ?
Soyons clairs, s’il y a eu ce qu’il y a eu ce dimanche noir (26 juillet 2020) où tout a basculé, c’est d’abord à cause de tous les sceptiques, les fous, les inconscients, qui ne croient pas au danger du nouveau Coronavirus.
Ils n’en ont fait qu’à leur tête. Pas de masques. Pas de crainte de contagion. Pas de distance physique. Au contraire, collons-nous les uns aux autres. Postillonnons à volonté, juste sous le nez du voisin. Pourquoi laver le fruit qu’on croque ? On ne meurt qu’une fois et c’est Dieu qui en décide…
Hé hé… Et le virus a circulé. Tant et si bien que, nous a-t-on dit plus tard, il a fait plus de victimes en une poignée de jours que durant les 4 derniers mois.
Du coup, les autorités ont paniqué.
Un communiqué est tombé dimanche après-midi décrétant la mise sous cloche de 8 villes, à partir de minuit du même jour ! Plus personne ne pourra ni y entrer, ni en sortir.
Cette fois-ci, ce sont les citoyens qui ont paniqué.
Beaucoup étaient à l’autre bout de chez eux, en ballade du week end ou en visite familiale, ne comptant rentrer que deux ou trois jours plus tard…
Tous ont pris la route affolés, craignant de rester bloqués loin de leur domicile, alors que Aïd Al Adha était annoncé pour le vendredi suivant (31 juillet).
Tout le monde en même temps sur les routes, de nuit et dans la panique… 3 heures pour avancer sur 3 kilomètres… Bousculades, insultes, imprudences… Les accidents ne se comptaient plus.
Le Reporter aussi en a pâti. Un de ses infographistes, parti en week end à Marrakech, victime d’un accident ce jour-là, a eu les deux bras cassés. Il lui faudra longtemps pour en retrouver l’usage. C’est la triste nouvelle qui attendait la rédaction, lundi matin…
Quelles leçons ? D’abord, que les sceptiques arrêtent d’être sceptiques. Il y a un dangereux virus qui tourne. S’ils lui facilitent la circulation, on sera tous punis… Enfin, tous ceux qui ne mourront pas de leur imprudence.
Ensuite, que les autorités donnent du temps aux citoyens pour appliquer leurs communiqués d’interdiction. Sinon, mourir de la pandémie dans un hôpital, ou mourir d’un accident sur les routes, c’est le même résultat.
Que chacun tienne compte de l’autre et il n’y aura pas d’ombre au tableau.
KB