Les équipes soignantes de l’hôpital Mohammed V à Casablanca ne savent toujours pas quand est-ce que la direction de cette structure publique va répondre à leur demande d’être logées dans un hôtel pour protéger leur famille contre le risque d’une contamination au virus de Covid-19.
Dans cet hôpital, une femme médecin est décédée et huit personnes du personnel ont déjà contracté le virus, affirment nos sources à l’hôpital. Celles-ci regrettent un manque de dépistage chez les personnels de santé, qui sont pourtant les plus exposés à une infection au virus.
Médecins, infirmiers et techniciens de la santé de cette structure sanitaire étaient très inquiets la semaine dernière et se posaient de nombreuses questions quant à la gestion de la crise. Ils ont d’ailleurs envoyé une lettre dans ce sens au délégué de la santé de Ain Sebaa Hay Mohammadi pour l’interpeller sur » la gravité de la situation ».
» Les mesures de sécurité relative à la prévention des risques Covid -19 dans les structures sanitaires dictées par le ministère de la Santé ne sont pas appliquées au niveau du service de pediatrie », affirment les signataires de cette lettre, dont Le Reporter détient copie. Ce qui met, disent-ils, la vie du personnel et des patients en danger.
La question des salles de service de pediatrie ayant été transformées en locaux d’hébergement pour les médecins d’astreints Covid-19 et les infirmiers affectés aux urgences a heureusement été réglée et ce, après l’intervention, lundi dernier, du délégué de la santé, selon les mêmes sources.
Dans leur lettre, datée du 9 avril, les signataires indiquent que les salles de bains et la salle de repos sont utilisées par le personnel Covid-19 logé au niveau du service de pediatrie ».
Le personnel de ce service ajoute : » La porte du service empruntée incessament nous expose à un risque de transmission, vu que le service d’isolement se trouve au même étage ».
Aux dernières informations, le problème de la porte aurait également été réglé, mais sans pour autant diminuer la colère à l’hôpital.
Le Reporter a recueilli le témoignage d’une infirmière, stressée par l’idée de contracter le virus et d’infecter sa famille, alors que la maladie se propage à un rythme accéléré.
» Hier, j’ai passé 24 heures de garde au service d’isolement. Des malades y ont été testés positif au Cov-19″, témoigne notre infirmière, qui a requis l’anonymat. Et ce matin, dit-elle, à 8 heures, j’ai été au service de pediatrie
Je suis probablement contaminée, dit cette infirmière, qui regrette qu’on la renvoie chez elle avec le risque de contaminer sa famille.
Entre engagement sans faille et crainte pour nos famille, on souhaite que tout le personnel soit testé et logé dans un hôtel pour protéger notre famille, conclut cette infirmière.
» Comment peut-on faire prendre autant de risques pour le personnel soignant? Les erreurs ne doivent pas se répéter en ces temps de Coronavirus », regrette Habib Karoum, président de l’Association marocaine des sciences infirmières et techniques de santé (AMSITS).
Les autorités sanitaires, insiste-t-il, doivent être fermes à l’égard de tout responsable qui commet des erreurs, notamment en ce qui concerne les mesures de sécurité relative à la prévention des risques Covid -19 dans les structures sanitaires dictées par le ministère de la Santé ».
Evoquant les cas de contaminations du personnel de l’hôpital Mohammed V à Casablanca, le président de l’association ne mâche pas ses mots. » Une enquête doit être menée par le ministère de la santé face au possible « foyer » que pourrait représenter l’hôpital Mohammed V », dit-il, catégorique.
Ce n’est pas normal, dit-il. » Cette structure publique totalise un décès et déjà huit cas de contamination au virus, dont des médecins et des infirmiers. Soit 24% des contaminations sur le plan national ( 32) », constate le président de l’association. Parmi les contaminés, ajoute-t-il, un technicien magasinier. « Bizarre. Cette personne n’a pourtant aucun lien avec les soignants », conclut le président de l’AMSITS Habib Karoum.
Naîma Cherii
