En 2017, l’inflation a connu une décélération et la croissance se serait accélérée à 4% en 2017, ainsi que l’investissement. La dynamique de la consommation des ménages s’est poursuivie et le marché du travail, tiré par les activités agricoles, a connu une relative amélioration…
C’est en gros, ce qui ressort de la conférence de presse, tenue à Rabat, par Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib (BAM), à l’issue de la première réunion trimestrielle du Conseil d’administration de la banque centrale au titre de l’année 2018.
D’emblée, Jouahri a annoncé la décision de maintenir le taux directeur inchangé à 2,25%. Et d’expliquer qu’en analysant les évolutions récentes de la conjoncture économique et les projections macro-économiques de la Banque pour les deux prochaines années, le Conseil «a jugé que le niveau actuel du taux directeur reste approprié et a décidé de le maintenir inchangé».
Lors de cette réunion, a ajouté Jouahri, le Conseil a évalué l’état d’avancement de la mise en œuvre de la réforme du régime de change entamée le 15 janvier et a pris note, à cet égard, des bonnes conditions dans lesquelles se déroule cette réforme, de la réaction positive des marchés et de l’accueil favorable qui lui a été réservé par les institutions concernées, aussi bien au niveau national qu’international.
Décélération de l’inflation
Concernant l’inflation, elle a connu une décélération en 2017 à 0,7%, résultat d’un recul des prix des produits alimentaires à prix volatils, tandis que sa composante sous-jacente s’est toutefois accélérée à 1,3%, après une sensible baisse temporaire en 2016 à 0,8%, a relevé le wali de BAM, notant qu’à moyen terme, l’inflation augmenterait tout en restant à des niveaux modérés, pour atteindre 1,8% en 2018, à la faveur notamment du relèvement des tarifs réglementés et pour revenir à 1,5% en 2019.
Parallèlement, l’inflation sous-jacente devrait, sous l’effet de la consolidation de la demande intérieure et de la hausse de l’inflation importée, se situer à 1,4% en 2018, puis à 1,9% en 2019, a encore fait savoir le wali de BAM.
Une croissance accélérée
En outre, a fait remarquer Jouahri, la croissance se serait accélérée à 4% en 2017, portée par un rebond de 14,8% de la valeur ajoutée agricole, tandis que la progression de celle des activités non agricoles se serait limitée à 2,7%.
Pour 2018, les prévisions de Bank Al-Maghrib, établies sur la base des données pluviométriques et de la situation du couvert végétal arrêtées au 10 mars, font ressortir une estimation de la production céréalière autour de 80 millions de quintaux et une hausse de la valeur ajoutée agricole de 2,3%, a souligné Jouahri.
Quant aux activités non agricoles, elles continueraient leur reprise avec un taux de 3,2%, ce qui amènerait la croissance globale à 3,3%, a estimé Jouahri, ajoutant qu’en 2019, cette dernière s’accélèrerait à 3,5%, avec une amélioration de la valeur ajoutée agricole de 1,8% sous l’hypothèse d’une production céréalière de 70 millions de quintaux et une augmentation de celle des activités non agricoles de 3,6%.
Du côté de la demande, ces évolutions reflètent principalement une légère accélération de l’investissement et une poursuite de la dynamique de la consommation des ménages, alors que les exportations nettes devraient afficher une contribution négative en 2018 et quasi nulle en 2019.
Marché du travail: la reprise
Concernant le marché du travail, Jouahri a précisé qu’après une perte nette de 37.000 postes en 2016, la situation a connu une relative amélioration en 2017, tirée par les activités agricoles. Il a relevé que l’économie nationale a ainsi créé 86.000 emplois, dont 42.000 dans le secteur primaire, 26.000 dans les services, 11.000 dans le BTP et 7.000 dans l’industrie, y compris l’artisanat. Selon lui, une entrée nette de 135.000 demandeurs d’emploi a été enregistrée en 2017, avec toutefois une légère baisse du taux d’activité à 46,7% et un taux de chômage situé à 10,2%.
Comptes extérieurs, l’existant et l’hypothétique
Pour ce qui est des comptes extérieurs, l’année écoulée a connu une performance notable des exportations de biens, avec une progression de 9,4%, un net rebond des recettes Voyages de 8,5% à 69,7 MMDH et une amélioration des transferts des MRE de 4,5% à 65,4 MMDH. Dans ce sens, Jouahri a indiqué que les importations de biens se sont, quant à elles, accrues de 6,4%, tirées par une augmentation sensible de la facture énergétique de 27,4% à 69,7 MMDH, la première depuis 2012. Et de préciser que, tenant compte d’une entrée des dons du CCG de 9,5 MMDH, le déficit du compte courant se serait allégé de 4,4% à 3,8% du PIB. Le wali a toutefois rassuré qu’à moyen terme, la dynamique des exportations se poursuivrait, avec en particulier une hausse importante annoncée des ventes de l’industrie automobile en 2019, tout comme pour les recettes Voyages (5,7% en 2018 et 5,2% en 2019), tandis que les transferts des MRE progresseraient de 5% et 4,1% respectivement. Jouahri expliquera ainsi que, pour ce qui est des importations, «leur rythme s’accélérerait à 7,1% en 2018, résultat notamment de l’accroissement prévu de la facture énergétique et des acquisitions de biens d’équipement, avant de ralentir à 4,2% en 2019. En tablant sur l’entrée du reliquat de 7 milliards des dons du CCG en 2018, le déficit du compte courant s’établirait autour de 4% du PIB en 2018 et en 2019».
Dans ces conditions et sous l’hypothèse d’afflux d’IDE équivalents à 4,4% du PIB en 2018 et à 3,5% du PIB en 2019, il a estimé que les réserves de change avoisineraient 257,3 MMDH en 2018 et 244,4 milliards en 2019, ce qui permet d’assurer la couverture respectivement de 5 mois et 26 jours et 5 mois et 17 jours d’importations de biens et services.
Assouplissement attendu des conditions monétaires
Quant aux conditions monétaires, le wali de la banque centrale a précisé qu’elles sont restées accommodantes en 2017, avec une dépréciation du taux de change effectif réel, notant qu’après une baisse de 46 points de base en 2016, les taux débiteurs se sont accrus en termes nominaux de 27 points, reflétant essentiellement une hausse des taux assortissant les prêts aux entreprises, notamment les facilités de trésorerie. Pour Jouahri, les conditions monétaires s’assoupliraient davantage à moyen terme, soutenue par une accentuation de la dépréciation du taux de change effectif réel en 2018.
Dans ce contexte, le crédit au secteur non financier a terminé l’année 2017 sur une progression de 3,7%, après 3,9%, recouvrant une décélération des prêts aux entreprises publiques et une accélération de ceux destinés aux entreprises privées et aux ménages. La prévision de la croissance non agricole a été ajustée à 4,5% en 2018 et en 2019.
Au niveau des finances publiques, le wali de Bank Al-Maghrib a fait savoir que l’exécution budgétaire au titre de 2017 s’est soldée par un déficit de 3,6% du PIB, expliquant que les recettes ont augmenté de 5,7%, avec une amélioration des rentrées fiscales et des dons du CCG, tandis que les dépenses globales se sont alourdies de 2,7%, avec en particulier des hausses de 8,7% de la charge de compensation à 15,3 MMDH et de 5,1% de l’investissement.
A moyen terme, a-t-il aussi fait savoir, l’ajustement budgétaire devrait se poursuivre, le déficit devant s’établir en moyenne à 3,2% du PIB en 2018 et en 2019.