Le Conseil de Bank Al-Maghrib (BAM), réuni mardi 23 septembre 2025 à Rabat pour sa 3ème réunion trimestrielle, a décidé de maintenir le taux directeur inchangé à 2,25%. Le Wali de la Banque Centrale et Président du Conseil, Abdellatif Jouahri, a expliqué à la presse cette décision.
Deux raisons ont été avancées pour le maintien du taux directeur inchangé. Le communiqué du Conseil qu’a repris le Wali dans ses explications les résume ainsi: «Tenant compte de l’évolution de l’inflation à des niveaux modérés et des incertitudes pesant sur les perspectives économiques qui demeurent à un niveau élevé, le Conseil a décidé de maintenir le taux directeur inchangé à 2,25%».
Il a cependant prévu de poursuivre parallèlement«le renforcement des mesures visant l’assouplissement des conditions de financement des entreprises, notamment les très petites entreprises (TPE)», a-t-il précisé.
De même qu’il«continuera de suivre de près l’évolution de la conjoncture et de fonder ses décisions, réunion par réunion, sur la base des données les plus actualisées», a-t-il indiqué.
Détaillant sa décision, le Conseil a, lors de cette 3ème réunion trimestrielle, analysé l’évolution de la conjoncture économique nationale et internationale et les projections macroéconomiques à moyen terme de la Banque centrale.
Il a ainsi constaté que les incertitudes sur le plan international continuent de peser sur les perspectives de l’économie mondiale qui devrait poursuivre son ralentissement, bienqu’à un rythme moins rapide que prévu en juin dernier.
Croissance et inflation
Au niveau national, les projections de Bank Al-Maghrib tablent sur une accélération de la croissance économique de 3,8% en 2024 à 4,6% cette année, et sur une consolidation à 4,4% en 2026.
La valeur ajoutée agricole ressortirait en hausse de 5% cette année, tenant compte d’une récolte céréalière de 41,3 millions de quintaux (MQx), puis de 3,2% en 2026, sous l’hypothèse d’une production de 50MQx.
Pour les secteurs non agricoles, et à la faveur notamment de la forte dynamique de l’investissement dans les infrastructures, leur croissance avoisinerait 4,5% en 2025 et en 2026.
Pour ce qui est de l’inflation, le Conseil estime qu’elle continue d’évoluer à des niveaux modérés, avec un taux moyen de 1,1% sur les huit premiers mois de 2025. Et, selon ses projections, elle devrait ressortir à 1% cette année, quasi-stable par rapport à 2024, avant de s’accélérer à 1,9% en 2026.
Sa composante sous-jacente passerait de 2,2% en 2024 à 1,1% en 2025 et s’accélérerait à 2% en 2026.
Quant aux anticipations d’inflation, elles restent bien ancrées, les experts du secteur financier tablant, au troisième trimestre 2025, sur des taux de 2,1% en moyenne à l’horizon de 8 trimestres et de 2,2% à celui de 12 trimestres.
Comptes extérieurs
Concernant les comptes extérieurs, selon les projections de BAM, la dynamique des échanges se poursuivrait à moyen terme, l’impact des récentes mesures tarifaires américaines devant demeurer faible.
Les exportations de biens augmenteraient ainsi de 6,2% en 2025, portées essentiellement par une hausse des ventes de phosphate et dérivés à 110,7 milliards de dirhams (MMDH), puis de 9,4% en 2026, avec la reprise attendue de l’industrie automobile, dont les ventes devraient rebondir de 20% en 2026 à 187,6 MMDH.
De leur côté, les importations s’accroîtraient de 7,4% en 2025 puis de 7,1% en 2026, reflétant en particulier une forte augmentation des acquisitions de biens d’équipement. Alors que la facture énergétique continuerait de s’alléger pour revenir à 94,4 MMDH en 2026.
Les recettes de voyages maintiendraient leur performance, avec de nouvelles progressions de 11,3% cette année et de 4,8% l’année prochaine à 131,2 MMDH.
S’agissant des transferts des Marocains résidant à l’étranger (MRE), après une quasi-stabilité attendue cette année, ils s’accroitraient de 4,8% en 2026 à 125,5 MMDH.
Dans ces conditions, le déficit du compte courant resterait contenu, se situant autour de 2,3% du PIB en 2025 et de 2% en 2026, après 1,2% en 2024.
En ce qui concerne les investissements directs étrangers (IDE), les recettes avoisineraient l’équivalent de 3,3% du PIB en 2025 et de 3,5% en 2026.
Au total, compte tenu des financements extérieurs prévus du Trésor, les avoirs officiels de réserve de BAM se renforceraient pour atteindre 418 MMDH à fin 2025 et 434,5 MMDH à fin 2026, des niveaux équivalents à 5 mois et demi d’importations de biens et services.
Conditions monétaires
Au chapitre des conditions monétaires, BAM indique que le déficit de liquidité devrait s’alléger à 115,3 MMDH à fin 2025, mais se creuserait à nouveau à 133 MMDH en 2026, tiré par la hausse de la circulation fiduciaire.
Côté crédit bancaire, le Conseil considère qu’au regard de l’évolution prévue de l’activité économique et des anticipations du système bancaire, sa composante destinée au secteur non financier connaitrait une nette accélération, progressant de 5,9% en 2025 et en 2026, au lieu de 2,7% en moyenne durant les deux années précédentes.
Le taux de change effectif réel, lui, ressortirait stable au terme de l’horizon de prévision, résultat d’une appréciation de 2,2% prévue cette année et d’un recul de 2,3% attendu en 2026.
Sur ce même registre, les évaluations trimestrielles réalisées par la Banque centrale, selon la dernière version de la méthodologie utilisée au niveau international, indiquent que la valeur de la monnaie nationale reste globalement alignée avec les fondamentaux économiques.
Finances publiques
Au volet des finances publiques, l’exécution budgétaire à fin août 2025 fait ressortir une nette amélioration de 14,5% des recettes ordinaires, portées principalement par la performance des rentrées fiscales.
En parallèle, reflétant l’accroissement des dépenses ordinaires et de l’investissement, les dépenses globales se sont alourdies de 12,6%.
Tenant compte de ces réalisations, des données de la Loi de Finances 2025, de la Programmation Budgétaire Triennale 2025-2027, des crédits supplémentaires ouverts par le Gouvernement en avril dernier et de l’orientation du projet de Loi de Finances 2026, les projections de BAM tablent sur un déficit budgétaire, hors produit de cession des participations de l’État, stable à 3,9% du PIB cette année et en atténuation à 3,4% en 2026.
Dette souveraine
Par ailleurs, au sujet de la dette souveraine du Maroc Abdellatif Jouahri, a soulignéles bonnes perspectives de la note attribuée par Standard &Poor’s (S&P).
«L’agence de notation américaine Standard &Poor’s (S&P) a fait évoluer ses perspectives pour le Maroc de ‘stable’ à ‘positive’, ce qui peut ouvrir la voie à un éventuel retour vers la notation de qualité d’investissement (Investment grade)», a dit le Wali de BAM.
Rappelant que le 15 septembre dernier, il s’est entretenu avec l’équipe de S&P qui examinera notamment la nouvelle programmation budgétaire triennale, la stabilisation de la croissance et le niveau du revenu par habitant, encore inférieur à la moyenne des pays notés comparables.