Pour les partisans d’un futur Etat palestinien dans le monde, c’est un septembre lumineux. Les reconnaissances se multiplient à l’ONU et touchent maintenant largement l’Occident à l’exclusion notable des USA. Mais…
Avec la Grande Bretagne et la France c’est le G7 qui s’engage et avec le Canada et l’Australie, des pays proches de Washington… On est loin du temps où la Palestine était reconnue uniquement par les pays alors qualifiés de «tiers monde» et des pays du bloc soviétique.
Alors que la France, tout comme le Luxembourg, Malte, Monaco et Andorre ont reconnu, dans la nuit du 22 septembre 2025, lors de la 80ème Assemblée générale de l’ONU, un Etat Palestinien, la presse internationale n’a pas hésité à commenter le sujet. «La France défie Trump», titre le Washington Post alors qu’Israël et les Etats-Unis, avaient montré leur ferme opposition à cette reconnaissance. Le quotidien américain estime toutefois que cette annonce si elle représente un «coup de pouce moral pour les Palestiniens» ne «changera rien sur le terrain».
«Reconnaissance ou non, un Etat Palestinien semble plus lointain que jamais», estime de son côté le New York Times, qui n’hésite pas à rappeler le point de vue des Palestiniens qui, après près de deux ans d’une guerre qui a ravagé l’enclave de Gaza et fait des dizaines de milliers de morts, assurent que la perspective d’une solution à deux Etats semble plus éloignée que jamais.
C’est en effet le grand fossé. La reconnaissance du droit des Palestiniens à avoir un Etat ne résout rien concrètement sur le terrain.
On s’accroche à une solution à deux Etats qui parait de plus en plus inatteignable.
Netanyahu a été formel il n’y aura pas d’Etat palestinien quoi que vote l’ONU. Tant qu’il sera au pouvoir, lui ou ses alliés politiques, n’en déplaise au Président Macron, le chemin est fermé.
L’opinion israélienne n’y croit plus comme avant, conséquences du 7 Octobre.
Quant aux jeunes Palestiniens, 60 % de la population, l’impact des répressions et colonisations renforcent le courant de ceux qui ne veulent pas d’un Etat juif du tout.
Le Président français a voulu faire un coup à l’ONU. La reconnaissance de la France est certes importante, c’est un pays membre du Conseil de Sécurité et acteur historique dans cette région du monde. Son rôle d’ailleurs a été contesté et son influence est aujourd’hui très réduite.
Il y a aussi un enjeu français de politique intérieure comme en GB. Gaza est devenu en Europe et aux USA un thème de politique intérieure.
La communauté juive critique très vivement le Président français qui a oublié les conditions qu’il avait posé lui-même à cette reconnaissance, notamment le désarmement du Hamas et la libération des otages.
On peut parler de rupture. La communauté arabo musulmane comme la gauche française en Europe a de son côté largement approuvé cette décision, jugée prématurée cependant par une majorité de Français.
Le Hamas s’attribue le succès de ces reconnaissances, l’Autorité palestinienne reste plus réservée comme toujours.
Mais le grand problème reste que reconnu, l’Etat palestinien n’existe toujours pas, divisé entre une autorité fragile et discréditée en Cisjordanie et le Hamas très affaibli à Gaza.
Ce qui se passe en Cisjordanie, colonisation d’un autre temps, renforce les radicaux palestiniens qui ne veulent pas de la paix comme les colons et les juifs extrémistes.
Dans les pays arabes, la reconnaissance officielle de la Palestine par la France, mais aussi par le Luxembourg, Malte, Monaco et Andorre après la GB le Canada et l’Australie, n’a pas été tant relayée que cela puisqu’elle était attendue. En revanche, l’annonce le 24 juillet faite par le Président Emmanuel Macron, avait été saluée dans de nombreux pays arabes. Une décision qualifiée d’historique par l’Arabie saoudite, dans un article du média qatari Al-Arabiya English, daté du 25 juillet.
La chaîne qatarie Al-Jazira, avait aussi souligné l’importance diplomatique et politique de ce geste, attendu depuis en se demandant tout de même «La reconnaissance de la Palestine est-elle un moyen pour les dirigeants occidentaux de “sauver la face”» ? Bonne question.
Le média qatari Gulf Times, dans un article à la même date, lui, est surtout revenu sur l’annonce dimanche par le Canada, le Royaume-Uni et le Portugal, de la reconnaissance d’un Etat palestinien. «Ce moment marque un tournant pour les Palestiniens et leurs ambitions d’obtenir un Etat: jusqu’à présent, les puissances occidentales les plus influentes soutenaient que cela ne devait intervenir que dans le cadre d’un accord de paix négocié avec Israël», insistait le média. «Bien qu’il s’agisse d’un geste largement symbolique, il place ces pays en désaccord avec les États-Unis et Israël», détaillait l’article.
La chaîne Al-Jazira, a choisi de donner la parole à des Palestiniens vivant à Hébron et dans les environs. «Un choc pour Israël», «une vraie remise en cause du projet sioniste» et une «correction historique partielle».
D’ autres évoquent «l’espoir» suscité par cette reconnaissance mais aussi leurs inquiétudes que cela n’accroisse la colère du gouvernement israélien. Un vote qui a peu de chance d’arrêter la fuite en avant aventuriste de Tel Aviv.
Plus que par l’ONU, le chemin de la paix pourrait reprendre celui des pays arabes et du Golfe.
Patrice Zehr