L’Iran, l’un des pays les plus touchés par l’épidémie a pris la décision de sortir du confinement. Ce n’est certes pas parce que la situation sanitaire s’est améliorée, c’est simplement une obligation économique .L’histoire jugera le cynisme américain qui confine à l’inhumanité avec la poursuite des sanctions pendant cette période à nulle autre comparable. « Aujourd’hui, la lutte se fait en reprenant les activités économiques. Nous n’avons pas d’autre voie », a plaidé le président alors que le pays principal foyer de la pandémie au Proche-Orient. Dans le contexte de la crise sanitaire, et pour la première fois depuis 1960, l’Iran a demandé au Fonds monétaire international de lui faire un prêt de 5 milliards de dollars (environ 4,6 milliards d’euros). Les Etats-Unis s’y opposent, accusant Téhéran de vouloir utiliser cet argent pour ses « activités terroristes » dans la région, selon la porte-parole du département d’Etat des Etats-Unis, Morgan Deann Ortagus. Le régime est aux abois et craint l’effondrement économique, mais c’est le peuple iranien qui est la vraie victime d’une situation géopolitique maintenue pendant l’épidémie. L’Iran risque de s’effondrer, premier pays emporté peut être par la pandémie mondiale. Mais quelque soit le jugement que l’on porte sur le régime actuel, il y a bien non assistance à population en danger et peut être parlera t-on demain, mais trop tard, de crime sanitaire contre l’humanité.
Entre les risques pour la santé publique et ceux d’un effondrement économique, le président iranien, Hassan Rohani, a fait son choix. Malgré un danger d’accélération de la propagation du Covid-19, la République islamique s’oriente vers la reprise à très court terme de ses activités économiques, suscitant l’inquiétude des personnels soignants dans le pays, alors que la pandémie n’y est pas maîtrisée.
« Avant, la lutte [contre le coronavirus] se faisait en restant chez soi. Aujourd’hui, elle se fait en reprenant les activités économiques. Nous n’avons pas d’autre voie en face de nous », a résumé M. Rohani, mercredi 8 avril, lors de sa réunion hebdomadaire avec le cabinet. Ainsi, à partir du samedi 11 avril, deux tiers des activités dites « à faible risque » ont reprise en Iran, sauf dans la province de Téhéran, qui attendra une semaine de plus. La décision a été prise alors que le bilan officiel annoncé mercredi est de 3 993 morts et 64 586 cas confirmés. Selon les médecins consultés par Le Monde, ces chiffres sont largement sous-estimés.
Le grand rival sunnite du golfe aurait tort de s’en réjouir. L’Arabie saoudite est sur la corde raide depuis qu’elle a suspendu le petit pèlerinage musulman dans les lieux saints de l’islam pour prévenir la propagation du nouveau coronavirus, une décision jugée nécessaire mais aussi potentiellement coûteuse pour son économie et sa stature internationale. Pour Umar Karim, chercheur au centre de réflexion Royal United Services Institute, avec cette mesure inédite, « l’Arabie saoudite essaie de se présenter comme plus responsable que l’Iran », pointé du doigt pour sa négligence supposée lors de l’arrivée de la maladie sur son territoire.
Mais d’après M. Karim, basé à Londres, cette décision pourrait raviver « le débat politique dans le monde musulman sur la question de savoir si elle doit être la seule autorité sur le Hajj et les deux villes saintes » de La Mecque et Médine. A cela s’ajoute la baisse de la manne pétrolière. Le marché du pétrole va probablement rester au tapis durant les prochains mois, les rabais de l’Arabie saoudite se conjuguant avec le coup d’arrêt donné à la croissance économique mondiale par le coronavirus, qui a fait chuter la demande d’or noir, a ajouté cet analyste. Plus de six semaines après la découverte d’un premier cas en Arabie Saoudite, le coronavirus frappe au cœur de la famille royale”, écrit le New York Times. Celle-ci compte quelque 20 000 membres, dont plusieurs milliers qui bénéficient d’appointements et ou de postes officiels. “Beaucoup d’entre eux voyagent régulièrement en Europe, et ont ainsi pu rapporter le virus”, souligne le New York Times. Le journal américain affirme avoir eu accès à des instructions données à l’hôpital Roi Fayçal qui montrent que le système sanitaire se prépare à la mobilisation : L’hôpital d’élite qui traite les membres de la famille Al-Saoud est en train de préparer pas moins de 500 lits pour faire face à un afflux attendu de princes et de proches de la famille.” Pour le moment on parle de 150 contaminés. De son côté, le roi Salmane (84 ans) s’est confiné dans un palais situé sur une île dans la mer Rouge, près de la ville de Djeddah, tandis que le prince héritier, le tout-puissant Mohamed ben Salmane – ou MBS – s’est retiré avec une poignée de ministres sur la côte, dans le nord-ouest du pays. Une autre catégorie de la population est durement touchée : les travailleurs immigrés, surtout de l’Asie du Sud-Est, qui vivent souvent dans des logements insalubres et surpeuplés.
“Le tout premier cas d’infection par le coronavirus a été un Saoudien [chiite] de retour d’Iran”, explique un journal. Et c’est “la région est, où est concentrée la communauté chiite du pays”, qui a la première à être mise en confinement.
On voit que la rivalité et l’affrontement religieux se poursuivent hélas pendant la pandémie des deux cotés du golfe arabo- persique.