Atelier «Africa 21» à Tunis : Une campagne pour la protection de la Méditerranée est lancée. Des experts expliquent, alertent et rappellent…

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L’atelier régional sur la protection de la Méditerranée et la gestion raisonnée des ressources marines s’est terminé à Tunis le 12 décembre 2025, avec un appel engageant la communauté du Maghreb à agir pour préserver la mer Méditerranée.

Ce workshop de trois jours d’intenses travaux a été marqué par le lancement d’une campagne médiatique dédiée à la protection de la Méditerranée. L’engagement pour la défense et la préservation de cette mer et de ses écosystèmes s’inscrit dans une dynamique mondiale et régionale plus large, impliquant des accords internationaux (Convention de Barcelone) et des initiatives multilatérales (MedProgramme du FEM) pour lutter contre la pollution plastique, la surpêche, et le changement climatique.

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Comme le rappelle Julien Chambolle, Secrétaire général de l’Association «Africa21», «notre programme contribue à donner aux journalistes accès à des sources d’informations primaires de haute qualité et à des experts internationaux». «Cette association, qui anime un réseau de plus de 870 journalistes dans 43 pays africains, joue un rôle capital dans la sensibilisation aux enjeux des changements climatiques et du développement durable».

Enjeux multiples et complexes …

Organisé par «Africa 21», cet atelier d’envergure a rassemblé des experts, des chercheurs, des universitaires, des décideurs et des journalistes maghrébins.

L’occasion de faire le point sur la biodiversité et d’identifier les pistes d’action pour mettre en œuvre les Engagements de Nice pour l’Océan. Un exercice qui n’est pas chose aisée, dans une région méditerranéenne où les défis sont amplifiés par la surpêche, la pêche destructrice (chalutage), la pollution plastique et chimique, les défis climatiques, la pression de l’urbanisme, etc.

Alors que cette petite mer, semi-fermée, fait face à une convergence de crises, qui dégradent rapidement son environnement unique, avec des conséquences sérieuses pour sa biodiversité et les populations humaines qui en dépendent, l’urgence de transformer les engagements en actions concrètes pour conserver et exploiter durablement les ressources marines d’ici 2030 est d’une actualité brûlante.

Mais les enjeux de protection en Méditerranée sont multiples et sont de nature complexe, selon Antoine Lafitte, Directeur par intérim du Plan Bleu. L’expert ne manque pas d’arguments. «47 millions de ruraux n’ont pas d’assainissement et 40 villes côtières n’ont pas de stations d’épuration. Vous imaginez l’impact en termes de rejets sur le milieu marin. Et en termes de démographie, on a une population méditerranéenne qui n’arrête pas de croître, avec une population de la rive sud plus importante que la rive nord. Sans compter 30% du trafic maritime», affirme Antoine Lafitte, qui affirme que la mer méditerranéenne est soumise à d’intenses pressions qui menacent sa survie et celle des populations humaines, rendant une action urgente et concertée indispensable pour préserver ses écosystèmes.

Un point de vue partagé par Yassine Ramzi Sghaier, expert tunisien en biologie marine, qui insiste sur le fait que «plus que jamais, la protection de cette mer est une nécessité vitale et non pas une option». Ce scientifique appuie ses propos par des chiffres. «La Méditerranée représente seulement 0,3 du volume océanique. On peut dire que c’est vraiment insignifiant mais c’est presque 18% de la diversité marine, soit 17 milles espèces qui sont reconnues en mer Méditerranée. La diversité y est exceptionnelle. Mais cette biodiversité est soumise à plusieurs pressions, qui ont causé une régression des écosystèmes et des espèces marines», explique Yassine Ramzi Sghaier, également chargé de l’approche écosystémique et du programme de suivi au centre d’activité régional pour les aires spécialement protégées, SPA-RAC.

Il précise au passage que ce centre, basé à Tunis, est l’organisme clé soutenant la création et la gestion des Aires Marines Protégées (AMP) en Méditerranée, sous l’égide de la Convention de Barcelone, pour sauvegarder la biodiversité marine. Le centre aide les pays méditerranéens à mettre en œuvre le Protocole Aires Spécialement Protégées et Diversité Biologique, en élaborant des stratégies, en renforçant les capacités, et en encourageant des réseaux d’AMP (comme le projet MedMPAnet) pour arriver à des objectifs ambitieux, visant notamment à protéger 30 % des mers d’ici 2030.

Un objectif encore loin d’être atteint en Méditerranée où une des principales menaces pour les habitats et les espèces est le chalutage, dit l’expert Yassine Ramzi Sghair. Il met en avant «l’importance d’une convention internationale pour protéger les zones en haute mer et obliger les pays à ne pas utiliser cette technique de pêche».

Changer une crise en aubaine…

Le constat est alarmant: Le bassin de la Méditerranée, est l’une des régions les plus exposées aux effets du dérèglement climatique. Dr Monia El Bour, Présidente du comité C4 auprès de la CIESM et membre du comité de pilotage auprès du MedECC souligne que la Méditerranée se réchauffe 20% plus vite que la moyenne.

«La canicule marine accélère le remplacement des espèces. Avec une température de l’eau jusqu’à 6,5°C supérieure à la normale, les gorgones et les posidonies meurent en masse, obligeant poissons et crustacés, déjà menacés par des prédateurs d’origine tropicale, à migrer», dit cette scientifique, dans son intervention sur les conséquences du changement climatique sur l’environnement marin méditerranéen. Les chiffres sont sans équivoque.

En effet, pas moins de 986 espèces non indigènes ont été recensées en Méditerranée à cause de ce dérèglement, un taux qui figure parmi les taux d’invasion d’espèces exotiques les plus élevés au monde. Mais Dr Monia El Bour a souligné que ce défi peut être transformé en opportunités.

A ce ce sujet, elle a considéré que les efforts d’adaptation à ce phénomène d’invasion doivent encourager une approche de mise en valeur. «Tout ce qui ressort de la mer est exploitable et valorisable, à savoir notamment les espèces les plus toxiques et les plus invasives. Plutôt que d’être dans une logique de lutte contre des phénomènes tout à fait naturels générés par le dérèglement climatique, mieux vaut être dans une logique de valorisation qui transforme les menaces en opportunités» a-t-elle expliqué, avec conviction.

Sur ce plan, des coopérations entre les scientifiques et les pécheurs comme source d’information complémentaire sur les dynamiques des populations de poissons (diversité, fréquences) pourrait être d’un grand apport pour analyser les nouvelles tendances et développer des solutions de gestion durable, car les pêcheurs possèdent une connaissance empirique du terrain irremplaçable, permettant de compléter les données scientifiques et d’identifier des résolutions efficaces et adaptées, conclut la scientifique El Bour, lors de cet atelier maghrébin.

DNES à Tunis : Naima Cherii

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