Visiblement, le prix de la sardine n’a pas fini de nourrir la polémique. Alors que des sources professionnelles confient cette semaine à Le Reporter que la sardine devrait être vendue à 6-7 dirhams le kilo au consommateur final, les spéculations vont bon train à l’approche du mois de Ramadan.
Le prix de ce poisson connaît une augmentation spectaculaire et pourrait arriver à 25 voire 30 dirhams le kilogramme durant le mois sacré, selon les mêmes sources. Mais selon d’autres sources, certaines transactions commerciales jugées «illégales» dans certains ports du royaume seraient derrière la flambée du prix de la sardine.
Au port de Safi, pour ne citer que lui, les mêmes sources pointent deux criées dans ce port : une officielle et une autre criée « illégale ».
«En principe le poisson capturé doit aller à la criée officielle. Le prix référentiel est de 3 dirhams. Mais ce qui se passe c’est que le produit est débarqué sur le quai. Le poisson y est vendu et plusieurs mareyeurs qui ont des cartes professionnelles délivrées par l’ONP participent à cette criée « informelle». Sachant que plusieurs criées illégales peuvent avoir lieu sur le même quai. C’est ce qui fait augmenter d’ailleurs le prix de la sardine à l’intérieur même du port», affirment les mêmes sources.
Sur une vidéo diffusée par des professionnels mercredi 26 février au port de Safi, on voit en effet des caisses de sardines déposées sur le quai, et plusieurs personnes déclenchant une intense activité de négociation.
Approchées par Le Reporter, des sources bien informées au port de Safi dénoncent en effet «un marché noir qui sévit dans ce port».
Ces mêmes voix expliquent que la sardine de «contrebande» alimente actuellement tout un circuit où seraient impliqués des patrons de pêche et des mareyeurs grossistes.
Nos sources pointent même des agents à l’ONP et certains agents de contrôle à la délégation régionale de pêche à Safi de «laxisme».
Said Magueri, premier adjoint du secrétaire du syndicat démocratique de la pêche maritime, affilié à la fédération démocratique de travail à Safi ne mâche pas ses mots. Selon lui, l’activité est prise en otage par l’informel dans ce port.
«La vente de la sardine se fait sur le quai. Ce qui est illégal. Ce mercredi 26 février, une caisse de sardines de 22 kilogrammes a été cédée sur le quai à 250 dirhams, soit 11 dirhams le kilo », déplore Said Magueri, un marin-pêcheur exerçant dans la pêche côtière au port de Safi.
Le prix, dit-il, peut arriver jusqu’à 12 dirhams voir plus. Alors que le prix référentiel au niveau de la halle est de seulement 3 dirhams. Plusieurs mareyeurs s’adonnent à cette vente illégale, malheureusement on ferme les yeux sur cette criée «illégale» qui se fait sur le quai, poursuit-il.
Une situation qui, dit-il, a pris de l’ampleur depuis un certain temps déjà. «Sur les 80 bateaux de pêche que compte le port de Safi, la majorité ne respecte pas l’organisation des circuits de débarquement et de commercialisation du poisson dans ce port», affirme Said Magueri.
Selon ce professionnel, une bonne partie de la production capturée par ces bateaux et vendue sur le quai n’est pas déclarée. «Les mareyeurs déclarent moins de ce qu’ils ont pêché. Ils s’adonnent à cette activité pour échapper aux taxes. Ils arrivent à avoir de faux documents avec la complicité de certains responsables de l’ONP et certains agents de contrôle à l’administration. Ils ne déclarent pas la totalité de la production, ni d’ailleurs le prix réel du poisson cédé via cette «criée illégale». Ils déclarent seulement un prix référentiel de 3 dirhams au lieu du prix réel qui peut arriver à 12 dirhams le kilo», explique notre interlocuteur de syndicaliste, soulignant que le prix d’une caisse de sardines peut atteindre 350 dirhams.
C’est dire pour ce dernier, le manque à gagner que représente ce trafic pour le secteur. «C’est une véritable économie souterraine qui échappe à la trésorerie de l’Etat», dit encore Said Magueri, qui demande que le nécessaire soit fait pour stopper ce trafic.
Selon des sources au port, une délégation du département de la pêche s’est rendue au port de Safi il y a quelques semaines, mais nos sources au sein de ce port nous ont confié que cette visite a coïncidé avec un arrêt de l’activité au port de Safi.
N Cherii