Poisson pélagique : Des observateurs pointent des navires RSW pour non-respect des quotas

Les navires RSW pêchent-ils plus? Des observateurs pointent certains d’entre eux pour non-respect des quotas qui leur sont attribués et non déclaration des quantités supplémentaires au quota autorisé.

Les navires RSW (Refrigerated Sea Water) créent des remous à Dakhla. Sur place, des observateurs confient à Le Reporter que certains de ces navires ne respecteraient pas les quotas qui leur sont attribués. Selon eux, ces bateaux pêchent plus et seraient suspectés pour non déclaration des captures supplémentaires au quota autorisé.

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Ces navires (28 RSW), qui sont équipés d’un système de réfrigération à bord par eau de mer, ciblent principalement les espèces pélagiques telles que la sardine, le maquereau et le Cabaya. Du 1er janvier au 30 juin, ces bateaux sont autorisés à pêcher 200 tonnes de poissons chaque jour dans leurs filets. Et sur la période allant du 1er juillet au 31 décembre, ils peuvent capturer jusqu’à 250 tonnes de poissons.

Mais à en croire les dires des observateurs, certains navires puisent dans les richesses halieutiques de manière intensive et capturent jusqu’à 300 tonnes capturées en une journée, soit une capture «illégale» additionnelle de 100 tonnes, disent les mêmes sources, qui appellent à une procédure d’infraction contre ces navires, lesquels approvisionnent les usines industrielles de Dakhla.

Joint cette semaine par téléphone, un marin d’un de ces navires confirme, lui aussi, à Le Reporter ces pratiques controversées. «Certains navires pêchent plus de poissons que les quotas qui leur sont alloués. Normalement, ces navires RSW peuvent pêcher jusqu’à 10% de plus du quota attribué. Mais certains d’entre eux sont capables d’avaler jusqu’à 280 voire 300 tonnes dans leur filets», affirme ce marin-pêcheur.

Et ce n’est pas tout. Selon lui, les armateurs propriétaires de ces navires arrivent à faire passer leur capture sans que les quantités supplémentaires (80 à 100 tonnes) ne soient déclarées.

Comment expliquer ces pratiques illégales? Alors même qu’un nouveau système de pesage des captures déchargées par les navires RSW a été mis en œuvre. Ce système interdit le déchargement de toute capture supplémentaire au quota autorisé. Il consiste à mettre en place des équipements dotés de mécanismes spécifiques, permettant une meilleure maîtrise des quantités de poisson déchargées ainsi qu’une identification plus précise des espèces ciblées par cette flotte des navires RSW.

«On pensait qu’avec l’application de ce système, ces pratiques ne devraient pas avoir lieu», lance la même source. Notre source ne mâche pas ses mots. «Ce n’est pas normal compte tenu des volumes de poissons qui ne sont pas déclarés. C’est de la surpêche quand même. On est dégoûté, personne n’aime voir ça. Alors que nous assistons à une baisse drastique des stocks du poisson pélagique dans la zone comme dans les autres zones du pays. D’ailleurs, aujourd’hui, on est obligé de faire 16 heures pour capturer le poisson dans la zone frontière avec la Mauritanie. Alors qu’avant, on pêchait seulement à 4 heures des côtes de Dakhla», conclut notre interlocuteur.

Mais qu’en est-il alors du contrôle du respect des quotas de ces navires? Des inspecteurs maritimes effectuent-ils des inspections pour vérifier les captures ainsi déclarées à la DPM (délégation de la pêche maritime) par les capitaines? Cet objectif de contrôle peut-il réellement être mis en œuvre en mer?

Par téléphone, une source au port de Dakhla nous explique que le contrôle des pêches serait inexistant en mer. Arrivés au port, poursuit notre source, les capitaines déclarent à la DPM les quantités de poissons capturées, ajoutant que cette déclaration n’est pas accompagnée par un contrôle physique.

«Un contrôle physique des poissons n’est décidé que lorsqu’il y a des informations ou des alertes sur des cas suspects de surpêche. Cela concerne au minimum 5% du chargement total du bateau», affirme notre source.

La pêche pélagique menacée ?

Dans les milieux des professionnels, on se dit en tout cas inquiet. «La situation est vraiment préoccupante. Les stocks du poisson pélagiques ont fortement chuté. Et si on ne fait rien, la pêche pélagique est menacée dans la zone», affirme un professionnel de la pêche côtière à Dakhla.

Celui-ci critique les navires RSW d’avoir fortement participé à la baisse de la ressource. Il rappelle qu’une étude réalisée par l’INRH en 2023 a confirmé que l’état des ressources pélagiques reste hautement préoccupant notamment dans la zone dite (Stock C) à Dakhla.
Les chiffres officiels indiquaient que les débarquements des petits poissons pélagiques ont enregistré une diminution d’environ 26% entre 2022 et 2023.

C’est ce qui explique, dit-il, l’interdiction de la pêche de ces poissons en janvier 2024 dans les pêcheries de la zone sud. Cette décision est désormais prévue du 1er janvier jusqu’au 15 février pour Dakhla et jusqu’au 1er février pour les autres ports, rappelle encore notre source.

Au total, 28 navires RSW et 79 bateaux sardiniers au port de Dakhla sont concernés par cette interdiction. Mais la situation ne semble pas s’améliorer pour autant. «Cet arrêt d’activité est certes une bonne chose pour la préservation du stock du poisson pélagique. Mais un mois et demi d’arrêt d’activité c’est très peu. Il faut plus au regard de la forte chute de la ressource», affirme notre interlocuteur.

Les navires RSW agacent aussi les professionnels de la pêche artisanale comme Abdellah Lablihi, président de la Confédération nationale de la pêche artisanale. Ce professionnel, qui évoque une surexploitation de la pêche du poisson pélagique à Dakhla, n’y va pas par quatre chemins.

«La situation du pélagique est catastrophique. Il n’y a plus rien. Les sardiniers ne font rien. Beaucoup d’entre eux sont actuellement en arrêt. Ce sont les navires RSW qui sont responsables de cette situation catastrophique du poisson pélagique. Ils pêchent 90 % de la ressource marocaine en termes de poisson pélagique», déplore-t-il.
« Utilisant un filet pélagique interdit sur le plan international, ces navires aspirent tout sur leur passage», affirme le président de la Confédération, évoquant un véritable «massacre».

Naima Cherii

 

 

 

 

 

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