Commune de Sidi Belyout : Les désaccords arrivent au ministère de l’Intérieur

Rien ne va plus au Conseil de l’Arrondissement de Sidi Belyout. La présidente, Kenza Chraibi, et les différentes composantes de sa majorité sont en totale opposition. Les détails.

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Plaintes, déclarations, contre-déclarations, etc. Depuis plusieurs mois, la situation serait devenue explosive, selon plusieurs élus de cette majorité. Les accrochages sont allés crescendo, jusqu’à cette réunion du Conseil municipal où la première session ordinaire de 2023 a tourné au vinaigre.
Programmée mardi 24 janvier, ladite session n’a finalement pas été ouverte et ses travaux n’ont pas été entamés faute de quorum. Huit élus seulement, sur les trente composant le Conseil, ont répondu présent à l’appel, a-t-on appris auprès des mêmes élus joints par téléphone. La présidente du conseil, Kenza Chraibi, n’a pas été aperçue dans les parages non plus.

In fine, ladite session aurait été reportée à une date ne dépassant pas un délai maximal de trois à cinq jours, comme le stipule l’article 42 de la loi 113-14, explique un élu.
Dans une déclaration à Le Reporter, des élus protestataires ont dénoncé, entre autres, «une mauvaise gestion», «une dilapidation des deniers publics» et «le refus de la présidente d’envisager toute coopération qui favoriserait pourtant une transition dans l’intérêt des habitants». Situation qu’ils ont d’ailleurs déplorée dans des lettres écrites au ministère de l’intérieur, à la Cour des comptes et au gouverneur principal en charge de la préfecture de Casablanca Anfa. Le Reporter en détient copie.
Au vu du boycott affiché ce mardi 24 janvier, non seulement par les élus protestataires, qui font partie de la majorité, mais aussi par certains élus du PAM –parti auquel la présidente appartient-, il est clair que les choses ne risquent pas de se calmer de sitôt. Selon des sources concordantes, d’autres actions seraient en préparation. Pour cette session de janvier, comme il nous a été confié en fin de semaine par des élus de la majorité, il était prévisible que celle-ci ne se déroulera pas.
Dans un communiqué parvenu mardi 24 janvier à la rédaction, les élus protestataires ont d’ailleurs exposé plusieurs raisons qui les ont amenés à boycotter ladite session.

Manque de communication entre la présidente et son Conseil municipal, absence de gestion participative comme le stipule le contrat conclu avant l’élection des structures du Conseil, rejet de la demande des élus de tenir une session extraordinaire et des réunions des Commissions permanentes en application de la loi organique, refus d’inscrire les points proposés malgré leur importance et leur légalité, délégations «illégales», marchés accordés sans appels d’offres, etc. Ce sont là quelques raisons avancées par les élus contestataires dans leur communiqué dans lequel ils demandent l’intervention «urgente» des autorités compétentes pour éviter un clash au sein de la majorité qui pourrait complètement figer la commune de Sidi Belyout.

Une majorité, deux visions différentes !

«La situation n’est pas simple. Elle ne date pas d’aujourd’hui même si elle a tendance à se cristalliser», commentent plusieurs élus de la majorité. Le Reporter en a rencontré une douzaine lors d’une réunion qu’ils tenaient vendredi 19 janvier pour préparer leur action de ce mardi 24 janvier.
Pour les différents groupes au sein du Conseil, les raisons de leur colère ne sont pas différentes, et se rejoignent finalement quant à l’attitude de la présidente dans la gestion du bureau, souligne la 6è vice présidente, Latéfa Mourni. «Nous sommes dans la majorité, mais aucune discussion n’est réellement possible», affirme cette élue du RNI
«On souhaitait se faire élire pour renforcer les compétences de l’arrondissement, travailler les dossiers en profondeur et faire preuve de rigueur professionnelle en faveur des habitants», poursuit cette élue du RNI. Mais, dit-elle, «Nous avons deux visions bien différentes. C’est évident que pour les habitants, il y a également un mécontentement. Car depuis septembre 2021, on n’a encore rien fait pour eux. Pourtant, au sein du bureau, il y a des élus qui ont une longue expérience dans la gestion locale», estime l’élue Latéfa Mourni.
Même son de cloche chez Said Sbiti, membre au Conseil. Celui-ci regrette que les élus ne soient pas associés aux prises de décisions de la présidente. «On a essayé de faire en sorte que les choses avancent mais on n’a pas de réponses à nos demandes donc on a forcément de la frustration», tel est le sentiment de cet élu, qui trouvait le rôle des élus inutile dans ce Conseil.

Selon ce Conseiller, plusieurs dossiers doivent être gérés dans l’urgence comme celui des habitations menaçant ruine, de l’avenue royale, de l’occupation de l’espace public, des marchands ambulants ou encore du plan d’action 2023. «Nous avons besoin de prendre des décisions», insiste cet élu du MP. Il rappelle que dès le mois d’octobre, les élus de la majorité ont proposé de procéder à un amendement du règlement interne du Conseil pour la tenue d’une session chaque mois ou toutes les deux semaines, afin de débattre des différents points inscrits dans le mémorandum que les élus ont présenté à la présidente. Une lettre –dont Le Reporter détient copie- a été envoyée dans ce sens à la présidente.

Pour Said Sbiti, l’amendement dudit règlement prendrait tout son sens à l’heure où il va falloir débattre de tous les points qui inquiètent les habitants de Sidi Belyout. «Cela nous permettra de nous réunir plusieurs fois pendant l’année. La loi nous le permet», explique-t-il. «Nous avons souhaité obtenir des réponses favorables. Malheureusement, la demande signée par 18 élus est restée sans suite», regrette-t-il. «La présidente a fait obstruction à toutes nos propositions. C’est illégal !, a-t-il dénoncé.

Dépenses «non justifiées», «dilapidation des deniers publics»,…etc.

Les élus mécontents craignent que le manque de communication soit plus problématique à partir de la découverte de dépenses non justifiées. Ils soufflent au passage que les élus ont découvert qu’un montant de près de 120 mille dirhams aurait été versé à une association pour un «marché de transport». Ils affirment que cette opération ressemble à de la dilapidation des deniers publics, pour ne pas dire à de la malversation. Et pour cause, selon eux, le président de l’association en question serait un des adjoints de la présidente. «On ignore comment sont dépensés ces quelque 120 mille dirhams. La présidente soutient, dans une déclaration, qu’un appel d’offre avait été lancé. Qu’elle nous montre alors les documents de cet appel d’offre», tiennent-ils à souligner ajoutant qu’«il n’y a pas de trace de cet appel d’offre sur le portail des marchés publics!». Ce dossier, disent-ils, a fait l’objet de lettres que les élus protestataires ont écrites à la Cour des comptes et au ministère de l’intérieur. Ils espèrent que le ministère de l’Intérieur va ouvrir une enquête.
Autre dossier également évoqué  et qui fait aussi l’objet d’une lettre à la Cour des comptes, celui des travaux de derb Tazi. «La présidente a lancé un marché pour la rénovation  de cette zone. Le coût de cette opération est de 45 mille dirhams Mais c’est de la perte d’argent. Car il s’agit d’une zone de rénovation urbaine (ZRU). Et donc il est interdit de toucher à cette zone pendant dix ans», précise-t-on.
Du côté de Mohcine Laala, vice-président de la Commission financière et économique, on entend le même son de cloche. Pour cet élu du FFD, certaines décisions inquièteraient la majorité au sein du Conseil. Il redoute les conséquences financières pour la trésorerie de la commune. Il ne faut pas «se tromper de priorité et prendre le temps de réfléchir avant de lancer immédiatement des investissements pas tous importants et urgents surtout en ces temps de crise économique», insiste Mohcine Laala, qui pointe une mauvaise gestion. Il évoque notamment les travaux d’une fontaine construite dans la zone d’Oued El Makhazen, laquelle est concernée par le plan d’aménagement de l’avenue royale. «Cette décision ne devait pas être prise. Car il est interdit de faire un projet dans cette zone. Il fallait se concerter avec les membres du bureau et les commissions», dit-il.
Nous avons essayé de prendre contact avec la Présidente au téléphone pour répondre à nos questions, elle est restée injoignable. Un dossier à suivre…

Naîma Cherii

 

 

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