L’affaire est sur toutes les lèvres dans la région de Midelt. Le tueur de l’activiste Mohamed Haddaoui écope d’une peine de 25 ans d’emprisonnement pour «homicide et blessures volontaires». Le tribunal de Midelt a rendu sa décision mercredi 24 avril 2024.
«Aucune sentence ne pourra combler le vide laissé par la perte d’un être aimé. Mais au moins ce verdict apporte du baume au cœur de la famille de la victime», a commenté un associatif locale à Le Reporter.
La victime, Mohamed Haddaoui, un habitant de Tanourdy, 35 km de Midelt, était un activiste qui luttait sans relâche en traquant les mafieux du bois. Il a déposé plusieurs plaintes et réalisé des vidéos sur l’exploitation illégale du cèdre dans la forêt de Tanourdy pour réunir plus de preuves contre cette mafia.
Le Reporter avait visionné certaines vidéos que l’activiste avait postées déjà en 2020 sur les réseaux sociaux. Lors d’un entretien téléphonique avec le défunt en novembre 2021, Mohamed Haddaoui nous avait déclaré « qu’il y avait énormément de pression sur les forêts de la région et que le phénomène avait pris de l’ampleur pendant la crise sanitaire liée à Covid-19». Nous sommes allés le rencontrer à Boumia où nous nous sommes rendus jeudi 16 mars 2023 pour enquêter sur l’abattage illégal du cèdre dans les forêts de la région.
Depuis plusieurs années désormais, la «mafia du bois» fait parler d’elle dans les forêts de la région de Midelt. Cette mafia serait prête à tout pour protéger son business clandestin dans ces forêts devenues le théâtre de confrontation entre des trafiquants de bois et ceux qui veulent défendre la forêt, confient nos sources.
Il y a quelques années, deux gardes forestiers étaient «expédiés» à l’hôpital» par un groupe organisé qui s’activait dans ce commerce illégal. Ils ont été gravement blessés dans un accident alors qu’ils tentaient d’intercepter un camion chargé de madriers de bois coupé clandestinement dans la forêt de Boumia, «L’affaire de Mohamed Haddaoui» n’est donc pas le premier épisode du genre dans ces zones forestières où des activistes seraient également menacés.
En juillet 2023, la mort de cet activiste a d’ailleurs mis en lumière les méthodes de plus en plus violentes et criminelles des trafiquants de bois. Les quelques personnes qui essaient de signaler des activités illégales, comme Mohamed sont régulièrement menacées. Et Mohamed connaissait très bien ces forêts et savait qui sont ces braconniers du cèdre dans la forêt de Tanourdy où l’on vit et où l’on peut même mourir du bois. Mohamed en savait donc un peu trop sur un système mafieux qui décime la forêt. Il est mort pour avoir condamné le vol de bois dans la forêt de Tanourdy, regrettent nos sources.
Mohamed a été percuté par un automobiliste qui roulait à une grande vitesse. Le conducteur a roulé sur l’homme d’une cinquantaine d’années avant de s’évader, a appris Le Reporter des mêmes sources, confirmant une information de la presse locale.
L’activiste n’avait aucune chance. Le choc était d’une grande violence. Son état très grave. Il a été transporté à l’hôpital d’Errachidia, où il est décédé après quelques jours en coma. Le défunt a laissé une femme et deux enfants.
«Un accident de la circulation !». C’est ce qui avait été mentionné dans le procès-verbal, selon nos sources bien informées. «On voulait traiter l’affaire comme un accident de la circulation. Mais sous la pression de la presse locale et les déclarations graves de sa femme dans une vidéo, les circonstances du décès de Mohamed Haddaoui se sont précisées. Le conducteur, un trafiquant de bois, avait bien l’intention délibérée de tuer Mohamed. Une information judiciaire va donc être ouverte par le parquet pour «homicide et blessures volontaires» contre le chauffeur de la voiture», expliquent nos sources, lesquelles déplorent toujours les activités douteuses d’une mafia de cèdre qui continuent de sévir dans les forêts de Midelt !
Naîma Cherii