L’epidémiologiste spécialiste en Maladies infectieuses, Jaafar Heikel estime qu’à ce stade de l’épidémie, il est crucial que le Maroc passe à une phase de dépistage plus « élargie » et « ciblée« .
Dépistage « ciblé » ou dépistage « plus élargi »? Alors que le nombre des cas déclarés coronavirus a encore augmenté ce mardi pour grimper à 602 cas et 36 morts, la question de dépistage anime les débats.
Jusqu’ici, le Maroc n’a testé que les patients suspectés d’être contaminés par le virus de Covid-19. Il a réalisé quelque 2400 tests de dépistage mais il peut aller au-delà, selon des sources médicales.
» Notre stratégie vise jusqu’ici un dépistage sur la base de définition des cas. Ce qui était une bonne stratégie à un moment particulier », explique l’epidémiologiste spécialiste en Maladies infectieuses, Jaafar Heikel. Mais à ce stade de l’épidémie, il est crucial que le Maroc passe à une phase de dépistage plus élargie et ciblée, affirme Pr Jaafar Heikel.
» Ce n’est pas incompatible. Mais le problème est que l’on est aujourd’hui dans une dynamique épidémiologique et cette nouvelle dynamique nous impose d’élargir le dépistage », dit-il.
Il y a deux semaines, ajoute-t-il, » nous avons constaté que le nombre des cas coronavirus déclarés étaient de l’ordre de 5 -10 à 20 nouveaux cas. Mais depuis maintenant une semaine, nous avons entre 20 à 50 cas confirmés voir même plus de 100 cas par jour ».
Pour cet épidémiologiste, le virus a circulé de façon plus importante au niveau de la population marocaine y compris pour des personnes qui n’ont jamais voyagé ou qui n’étaient pas dans des pays à risque.
» Nous avons maintenant des cas locaux et des cas communautaires. Alors que nous avions uniquemement des cas importés. C’est une nouvelle dynamique », commente Pr Jaafar Heikel, lequel explique qu’il y a un avantage particulier à faire un dėpistage plus élargi et ciblé pour les citoyens en général.
Objectif : dépister le maximum des cas, qui seraient assymptomatiques ou qui auraient des symptômes mineurs, particulièrement au sein des personnes vulnérables ou à risques. » Si nous arrivons à dėpister le maximum des sujets qui ont des symptômes mineurs, nous pouvons alors les traiter à temps, tout en les gardant sous surveillance médicale, soit chez eux soit dans des endroits appropriés », explique Pr Jaafar Heikel.
Il poursuit : » Le Maroc s’est s’inscrit dans le cadre d’un protocole thérapeutique particulier. Ce qui permet de les prendre en charge pour que leur cas ne s’aggrave pas et pour éviter qu’ils n’aillent en soins intensifs ou en réanimation ».
Pour le spécialiste, un dépistage élargi permettra de restreindre le niveau de transmission du virus au sein de la population. » les personnes qui seraient dépistées on les confinerait beaucoup plus et on les traiterait. Cela empêcherait le virus de se propager à une population plus vulnérables et plus susceptible d’attraper ce virus », relève l’epidemiologiste.
Ce dépistage doit être fait d’abord sur le plan géographique mais également sur le plan des critères, insiste le spécialiste.
A ce stade, seules les personnes suspectées d’être infectées par le coronavirus étaient testées. Après douze jours du confinement, alors que la maladie continue de se propager, il faudra atteindre des capacités de test plus élargies. » Cela sera possible dans les prochains jours avec la contribution de 48 hôpitaux prefectoraux qui vont désormais faire le dépistage a travers le pays au lieu de trois seulement. Il y a d’ailleurs une circulaire du ministre de la santé dans ce sens. C’est une bonne chose », indique l’épidémiologiste, ajoutant qu’il faudra aggrėer certaines structures privées pour également pouvoir faire le dépistage pour que les gens puisse y avoir accès.
A-t-on les moyens pour faire un dépistage plus élargi? Depuis la déclaration du premier cas coronavirus, le Maroc a réalisé seulement 2400 dépistages, alors que d’autres pays en font 20.000 par jour, souligne l’epidémiologiste spécialiste en Maladies infectieuses, Jaafar Heikel.
Certes, dit-dit-il, » Nous devons revoir notre stratégie de dépistage pour la renforcer et l’élargir. Mais aujourd’hui, nous devons faire ce que nos pouvons pour endiguer la pandémie ». Il conclut : « Si nous faisons le dépistage au bon moment, nous allons pouvoir suivre des personnes à domicile ou dans des unités ambulatoires qui ne nécessite pas de prendre des places en milieux de soin spécialisés qui doivent être réservés aux cas compliqués ou graves ».
Naîma Cherii